Je l’annonce d’emblée, j’aime Marjane Satrapi.

Une amie m’avait offert il y a quelques années le livre « Broderies » et jusqu’alors, je n’avais jamais entendu parler de cette grande dame. Quelle surprise, quel brin de folie, une artiste iconoclaste tordant le cou aux stéréotypes avec dérision et poésie.

« Voices » ne déroge pas à la règle, une fois de plus Marjane Satrapi nous livre une pépite cinématographique, mélangeant différents genres pour créer un film atypique à la fois horrifique, surréaliste et drôle.

Jerry Hickfang (Ryan Reynolds) est un gentil pataud menant une vie paisible, empli d’enthousiasme et de bonne volonté, ayant une vision du monde particulièrement édulcorée, où les animaux parlent, comme ses deux compagnons, son chat Mr Moustache et son chien Bosco. Mais un soir alors que Jerry réussit enfin à sortir avec sa collègue Fiona (Gemma Arterton) dont il est follement épris, l’impensable se produit, il la tue sauvagement.

Jerry est d’autant plus choqué car il veut être une bonne personne et ne comprends pas ses propres agissements. Bosco tente de la rassurer, de lui faire entendre raison et lui conseille de se dénoncer à la police tandis que Mr Moustache le pousse à extérioriser le monstre en lui et à commettre d’autres atrocités. Ce meurtre sera le premier d’une série.

Le point de vue adopté par Marjane Satrapi contribue grandement à l’originalité du film. Les victimes sont secondaires car les sentiments éprouvés par Jerry sont au cœur du scénario, créant une sorte de compassion et d’attachement pour ce tueur en série. Dès le départ, nul doute ne plane sur sa culpabilité, pourtant Jerry souffre vraiment de ce qu’il est. Heureusement ses cachets lui permettent de masquer l’horreur de ses actes, d’avoir des visions improbables mais ne pondère en rien ses crimes.

Tous les clichés des films d’horreur et des thrillers sont exploités, caricaturés et portés à leur paroxysme mais toujours avec humour. Les éléments fantastiques confèrent à « Voices » un caractère loufoque et unique.

Ryan Reynolds tient là peut-être son plus grand rôle, l’expression pathétique de son visage, la naïveté de son regard apporte une étincelle d’humanité à ce personnage, un nounours au grand cœur, prêt à vous étreindre jusqu’à l’étouffement.

« Voices » confirme le talent de réalisatrice et de narratrice de Marjane Satrapi. Le sujet est certes vu et revu mais sa patte artistique et sa sensibilité épineuse ont su insuffler un vent de fraîcheur, là où d’autres se seraient probablement cassés les dents.

Je conclurai ainsi, Norman Bates est à Alfred Hitchcok ce que Jerry Hickfang est à Marjane Satrapi.

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