au revoir la hautCe livre a raflé bon nombre de prix en 2013 (dont le Goncourt, pour ne citer que le plus connu), et, après lecture, je comprends pourquoi !

Pour commencer, je vais parler du titre. Au revoir là-haut sont les derniers mots écrits par Jean Blanchard à sa femme. Petit point historique, il fit parti des Martyrs de Vingré, à savoir six poilus fusillés pour avoir « déserté » sur vingt-quatre au total. Pourquoi cela ? Pour s’être replié dans les boyaux après qu’une partie de leur tranchée ait été détruite et prise par les Allemands, sachant qu’ils ont ensuite menés la contre-attaque et l’ont reprise. Injustice. Ils furent néanmoins réhabilités après la guerre.

Ce titre, je le trouve extrêmement bien trouvé. Je le trouve beau, simple, émouvant. C’est peut-être le plus bel hommage que Lemaitre pouvait rendre à nos Poilus.

Le roman en lui-même mêle fiction et faits réels. Tout d’abord, une première partie en novembre 1918, qui relate les atrocités de la guerre, les quelques jours précédents l’armistice, les liens qui se tissent entre soldats. C’est aussi là que l’on nous présente nos deux protagonistes, Albert Maillard et Edouard Pericourt. Sous le joug du capitaine Henri d’Aulnay-Pradelle, issu d’une famille déchu et qui ne cherche qu’à retrouver l’honneur perdu de sa famille, on assiste à un assaut aussi inutile que meurtrier. Lemaitre a su mettre de la vie dans ses mots pour nous montrer la Grande Guerre comme si nous regardions un film. Albert côtoie la mort de près lors de cet assaut ; Edouard devient une gueule cassée en le sauvant. Là encore, la description des blessures est saisissante, époustouflante, bien qu’horrible. Ainsi commence l’histoire et la véritable fraternité qui va unir nos deux compères.

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Un an plus tard, à Paris. On découvre la vie dans l’après guerre, la reconstruction, les dettes que cela a causé. Énormément d’hommes ont péri, d’autres ont été blessé, ce qui cause des problèmes pour se réintégrer dans la société. La pauvreté fait partie du quotidien. Se posent également des problèmes pour retrouver les Poilus, les enterrer, créer des monuments aux morts, etc. Edouard n’est plus apte à travailler, alors Albert se démène pour leur survie à tous deux. On découvre les dégâts physiques de la grande guerre, les dégâts sur la société, sur le pays, mais aussi sur l’esprit des Poilus, à qui les Français ne montrent pas réellement de gratitude pour avoir défendu leur pays. Là encore, Lemaitre a su totalement mettre sur pied l’atmosphère de l’après-guerre, chose dont nous n’avons pas toujours conscience.

Edouard a perdu tout goût à la vie. Albert lutte pour leur survie commune. Puis, à l’aide de Louise, une enfant d’une dizaine d’années, Edouard retrouve peu à peu de l’entrain. Jusqu’à ce que germe une idée, celle d’une arnaque qui peut les rendre riches. Une arnaque rocambolesque, mais tellement bien trouvée. Là encore, bien que s’étant inspiré d’un article, Lemaitre a su trouver une manigance digne de Frank Abagnale Jr dans Arrête moi si tu peux.Génie.

Pierre Lemaitre a su écrire comme l’aurait fait un homme en 1918. Une écriture un peu « vieillote » mais simple à comprendre. Cette écriture nous permet de vivre encore plus intensément ce roman. Mêlant histoire et fiction, c’est véritablement un chef d’œuvre qui nous a été pondu là. C’est un enseignement nous montrant les horreurs de la Grande Guerre mais aussi des difficultés régnant après. C’est également un témoignage plein de courage et une belle histoire entre deux hommes. On ne s’ennuie pas durant les 570 et quelques pages.

Actuellement publié chez Albin Michel, ce roman coûte 22,50 euros. Pas donné pour un bouquin, mais la qualité nous fait vite oublier ce prix.

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