Après 2001, L’Odyssée de l’Espace, le célèbre réalisateur comptait réaliser un autre projet très ambitieux : un film sur Napoléon, emblème de l’Histoire de France. Néanmoins, le long-métrage ne verra jamais le jour et sa légende reste intacte encore aujourd’hui.
La fascination du personnage
Dans le cadre du livre de Joseph Gelmis, The Film Director as Superstar, Stanley Kubrick justifie son envie de faire un film sur Napoléon. « Pour commencer, il me fascine. On a décrit sa vie comme une épopée. (…) C’est l’un de ces hommes rares qui font avancer l’histoire, qui façonnent le destin de leur époque et des générations à venir. (…) Sans compter, bien sûr, qu’on n’a jamais encore fait un film bon et précis sur lui. (…) Ce ne sera donc pas une simple reconstitution historique poussiéreuse« . Cette citation annonce la couleur de l’ambition du réalisateur.
Le projet demandait une préparation intense, et Kubrick s’y attela avec passion. Toujours à Joseph Gelmis, il explique : « Ma première étape a été de lire tout ce qui me tombait sous la main concernant Napoléon, et de me plonger complètement dans sa vie. Je crois que j’ai bien dû lire plusieurs centaines de livres à son sujet« .
L’intimité face au champ de bataille
Stanley Kubrick désirait dépeindre Napoléon en tant qu’être humain, indépendamment de ses prouesses guerrières. Ses sentiments, sa vie personnelle allaient être exploitées au même titre que ses combats sur le champ de bataille. Le cinéaste cherchait à imager la vie de l’Empereur dans sa globalité, rendre sa vie palpable pour le spectateur comme si elle se déroulait devant ses yeux.
Dans une volonté perpétuelle de réalisme, Kubrick comptait recruter des milliers de figurants pour les scènes de combat. On retrouvait ainsi plus de dix milles cavaliers ou encore quarante-mille fantassins, soit l’armée entière d’un pays ! Il affirme à Gelmis qu’il voyait ces scènes comme « un vaste tableau où les formations se déplacent d’une manière quasi chorégraphique« .
Exemples d’uniformes dont Kubrick s’est inspiré pour Napoléon.
L’abandon d’un projet titanesque
Kubrick avait une idée très sulfureuse de son scénario, ce qui ne s’associe guère avec l’image que l’on se fait des films accessibles au grand public. Le scénario contenait en plus cent vingt-six pages, ce qui revient à un film de trois heures… Par ailleurs, à la même période sort Waterloo de Sergueï Bondartchouk, qui constitue un échec cuisant au box office. Autant dire que sortir un autre film sur Napoléon est un pari perdu d’avance.
Le projet était trop ambitieux pour l’époque : la MGM, l’entreprise qui produit le film, doute de sa rentabilité. En effet, la fin des années 1960 marque l’échec commercial de plusieurs grosses productions et la MGM se détourne de Napoléon. Kubrick finit lui-même par se détourner de son projet, réalisant Orange Mécanique puis Barry Lyndon dans la foulée, un autre film historique à gros budget.
Pour plus de détails, je vous invite à lire Les archives de Stanley Kubrick, édité par Alison Castle aux éditions Taschen.