A n’en pas douter, quand il a dit « les hommes élèvent trop de murs et ne construisent pas assez de ponts », Isaac Newton n’avait pas dû faire face à des hordes mongoles déchainées. Faute de quoi, il se serait lui aussi mué en maçon-combattant de la première heure. C’est d’ailleurs ce rôle qu’Awaken Realms nous propose d’endosser avec leur nouveau (et somptueux) jeu : The Great Wall !
Du haut des remparts, les flèches pleuvent comme le crachin d’une nuit d’automne. Avec application, vos meilleurs archers accompagnent la charge héroïque de vos cavaliers au cœur de la horde qui menace l’empire. Cela suffira-t-il à éviter une brèche ? Vous en doutez et le cœur assombri à cette pensée, vous tournez votre regard vers l’arrière du camp, là où les contremaitres s’échinent à rassembler le matériel nécessaire à la construction d’une nouvelle portion de muraille. Sera-t-elle prête à temps ? Il le faudrait. Pour ne pas susciter le courroux de l’Empereur. Pour ne pas que dans le déshonneur, votre tête roule à ses pieds…
Another brick in the Wall…
The Great Wall est un plongeon en pleine dynastie Jin et les joueurs vont y incarner des généraux défendant la Grande Muraille (enfin juste la Muraille, elle n’est pas encore si grande) face aux hordes mongoles. Au fil de la partie, et au gré des saisons, des hordes vont en effet venir s’accumuler au pied de la Muraille en construction. En leur qualité de général, les joueurs devront affiner leur stratégie (en jouant les cartes ad hoc), produire des ressources, recruter de nouveaux soldats, construire des portions de muraille, entretenir de bonnes relations avec l’Empereur et bien sûr veiller à ne pas se couvrir de honte ni à trop céder sa place dans la cérémonie du thé. Et c’est tout ? Evidemment non, une fois tout cela fait, il faudra faire face à l’attaque des puissants mongols en activant les valeureux soldats de l’Empire et en priant pour qu’aucune brèche ne survienne…
… Hey mongols, leave the Emperor alone
Comme toujours avec les jeux signés par le talentueux studio polonais Awaken Realms, The Great Wall est un jeu très fouillé en plus d’être original. Déjà (et là aussi comme toujours), son matériel est aussi pléthorique que somptueux. A peine ouvert, le jeu se mue en mobilisation générale tant les joueurs n’ont qu’une envie : répondre à l’appel de l’Empereur. Bien sûr, ce matériel soigné participe pleinement à l’immersion dans la partie mais il n’est pas le seul tant les différentes mécaniques ont été bien pensées par rapport à l’univers du jeu. Ici, par le choix du général et de ses proches conseillers, le jeu débute par une légère (mais progressive) asymétrie. Cela donnera du corps au jeu mais lui assurera aussi une belle rejouabilité.
En plus, The Great Wall n’est pas un ‘simple’ jeu de placement d’ouvriers, cet aspect n’étant qu’un volet du jeu (néanmoins important) parmi d’autres. D’ailleurs, si la production de ressources est essentielle, les joueurs auront en permanence le regard tourné vers l’autre côté de la Muraille car c’est aussi (et surtout) sur le champ de bataille que se gagnera la reconnaissance de l’Empereur.
Qui dit guerre dit aussi profiteurs de guerre…
C’est un fait et l’histoire l’a d’ailleurs trop souvent démontré. Bien sûr, la guerre mise en scène dans le jeu ne fera pas exception à ce principe. Il faut dire que la rivalité qui anime les différents généraux assis autour de la table atteindra vite son paroxysme. Après tout, l’Empereur n’a de la place que pour un seul chouchou n’est-ce pas ? Dans sa version classique, le jeu encouragera donc les joueurs à coopérer s’ils veulent éviter de trop nombreuses brèches dans la Muraille mais si chacun cherchera à se montrer héroïque et vertueux, il faudra aussi savoir faire preuve de fourberie quand il s’agira de laisser un adversaire gérer une horde particulièrement hostile comme quand il s’agira de le forcer à prendre un jeton de déshonneur.
Et que ceux qui ne tiennent pas la crapulerie pour amie ou l’opportunisme pour allié se rassurent, The Great Wall propose aussi un mode de jeu complètement coopératif. Celui-ci est d’ailleurs particulièrement bien réussi et apportera là encore une belle variété aux parties (surtout pour ceux qui apprécieront de sauter d’un mode de jeu à l’autre).
Faites-entrer le dragon (et préparez la poudre) !
Nous l’avons dit, The Great Wall est un jeu très fourni qui se suffit largement à lui-même. Néanmoins, plusieurs extensions sont disponibles (puisqu’issues de la campagne de financement participatif).
En premier lieu, Poudre Noire vous plongera un peu beaucoup plus dans les affres de la guerre. Grâce à cette extension, il vous sera possible d’équiper votre muraille de puissants engins militaires comme des canons ou des arbalètes de siège. Mais évidemment, face à ces nouveaux moyens de défense, vos ennemis n’ont pas choisi de venir tout nus ! Ils se sont pour leur part équipés de béliers, de catapultes et même de tours de siège. Et en plus de ces nouveaux engins guerriers qui modifieront la visage de la bataille au pied de la Muraille, Poudre Noire va encore renforcer l’asymétrie du jeu en permettant à chaque clan de développer un soldat unique. Le tout, évidemment accompagné de nouvelles cartes Horde, Généraux, Conseillers et même d’un précieux arbre de technologie !
Quant à l’extension Monstres Antiques, elle ajoutera elle-aussi de nouveaux conseillers mais son apport sera que parmi ceux-ci, quatre conseillers spéciaux seront basés sur des créatures légendaires de la mythologie chinoise. Il vous sera ainsi possible de renforcer la hargne de vos soldats grâce à Yinglong, le puissant dragon ailé, d’améliorer vos capacités défensives grâce à Ao, la tortue spirituelle ou encore d’améliorer vos productions de ressources grâce à Qilin, symbole de prospérité.
Vous en voulez plus ? Alors sachez également que la boîte Stretch Goals est disponible à l’achat. Celle-ci contient tous les stretch goals débloqués lors de la campagne de financement participatif soit au total plus de 90 cartes et 30 meeples !
En conclusion
The Great Wall est un jeu riche, au thème fort et très bien ancré dans son univers. Son matériel est irréprochable en plus d’être pléthorique et quant à ses mécaniques, elles soufflent un vent de fraicheur bienvenu dans ce type de jeu. Nous avons beaucoup apprécié son aspect semi-coopératif ainsi que l’asymétrie progressive qu’il propose. Mais nous vous laissons là, une horde mongole frappe à la porte de la Muraille et il est l’heure d’aller la pourfendre (ou plutôt d’encourager un autre Général à le faire). Gnirak gniark.
The Great Wall, un jeu de Kamil ‘Sanex’ Cieśla, Robert Plesowicz et Łukasz Włodarczyk, édité par Awaken Realms pour la version originale, adapté en français par Edge et distribué par Asmodée.
Nombre de joueurs : 1 à 4
Âge : dès 14 ans
Durée moyenne d’une partie : 120 à 180 minutes