Après nous avoir envoûtés avec son étrange Carnaval des Ombres, R.J. Ellory nous transporte aux confins du monde connu, dans un univers glacial où la folie des hommes n’a d’égale que la rudesse de l’hiver. Plongée dans une saison impitoyable, celle que l’on dit pour les ombres…
L’appel que Jack Deveraux reçut ce jour-là, il l’attendait autant qu’il le redoutait depuis près de trois décennies. A l’autre bout de la ligne, un homme se présente comme le shérif d’une petite ville minière du Grand Nord dont personne n’a entendu parler. Personne ou presque car pour Jack, le nom de Jasperville résonne douloureusement. C’est là-bas, sur ces terres gelées et sous ce climat hostile, qu’il a grandi. A l’époque, il était encore Jacques et désormais, sa famille – ou ce qu’il en reste – a besoin de lui. Face à ses responsabilités, Jack n’a d’autre choix que d’affronter les fantômes de son passé. Et qui sait de peut-être enfin lever le voile sur le mystère des trop nombreux corps de jeunes femmes dont le sang était venu maculer la neige…
En choisissant de mettre en scène un anti-héros ordinaire, aux failles et aux faiblesses assumées, R.J. Ellory mélange avec habileté le thriller et le roman intimiste. Car une saison pour les ombres n’est pas uniquement le récit d’une enquête destinée à faire la lumière sur des meurtres que l’on a un peu trop facilement attribués à des attaques d’animaux sauvages. Non, en se plongeant dans cette histoire, le lecteur découvrira toute la rudesse de l’enfance de celui qui y tient le rôle-titre et comprendra vite qu’il s’agit aussi (et peut-être surtout) d’une quête rédemptrice. Une quête au-dessus de laquelle plane l’ombre de la folie humaine et des vieilles légendes indiennes.
Cela dit, ce mélange des genres n’est pas le plus grand tour de force réalisé par R.J. Ellory dans Une saison pour les ombres. Ici, ce qui frappe avant tout, c’est la capacité de l’auteur à transformer un lieu en personnage central de son histoire. Tout au long de sa lecture, le lecteur aura l’étrange sentiment que la main glacée de l’environnement dans lequel évoluent les personnages reste posée sur son épaule. De l’ombre des Monts Torngat qui projettent leur désespoir sur toute la ville jusqu’aux marais gelés qui entourent la bourgade en passant par le ciel trop bas et toujours menaçant, l’univers glaçant créé par R.J. Ellory est omniprésent.
En conclusion, avec Une saison pour les ombres, R.J. Ellory confirme une nouvelle fois – si besoin en était – sa capacité à manier la plume avec une justesse et une précision chirurgicale.
Une saison pour les ombres, un roman de R.J. Ellory publié aux éditions Sonatine.