Ankh : les Dieux d’Egypte est en quelque sorte le nouveau volet de l’épopée mythologique signée Eric M. Lang. Il prend donc la suite de Blood Rage et de Rising Sun (et on a aussi envie d’ajouter du Parrain parce que qui ici osera dire que Don Corleone n’est pas un dieu ?). Cette fois-ci, le prolifique auteur nous emmène sur les sables chauds (et disputés) d’Egypte pour un combat des dieux qui ne laissera personne indifférent (ni éternel) …
Aussi sûrs de leur puissance que de leur immortalité, les dieux d’Egypte régnaient sans crainte sur le pays des pharaons. Même les dix plaies que Yahvé avait fait pleuvoir sur leur contrée n’avaient pas réussi à ébranler leur pouvoir ou l’adoration que le peuple égyptien leur vouait. Et pourtant, sans qu’ils aient pu l’anticiper, une onzième plaie allait reléguer les invasions de sauterelles, la peste du bétail ou l’eau du Nil se changeant en sang au rang de calamités anecdotiques. Cette onzième plaie avait pour nom l’essor du monothéisme et pour la première fois, les dieux se mirent à trembler sur leur piédestal…
Priez-moi, priez-moi, priez-moi ! C’est le chant de l’Isis qui panique…
Dans Ankh : les Dieux d’Egypte, chaque joueur va incarner un dieu descendu sur les plaines du Nil pour y affronter les autres divinités. Il faut dire que la règle du monothéisme en approche est très claire : à la fin, il n’en restera qu’un (et ne niez pas, on sait que vous avez lu cette phrase avec la voix de Denis Brogniart en tête). Tout au long de la partie, il s’agira pour les joueurs de réaliser des actions simples (mais ô combien calculatoires, nous y reviendrons) pour asseoir sa domination. Celles-ci permettront d’invoquer des figurines, de les déplacer sur le plateau, de recruter des fidèles et bien sûr de gagner de nouveaux pouvoirs.
Et c’est tout ? Eh oui, les actions sont aussi simples que ça mais tout le sel (et le génie) du jeu est dans leur subtil enchainement. En effet, à chaque fois qu’un joueur effectue une action, il fait avancer le marqueur correspondant sur la piste des actions communes et quand l’un d’eux atteint le bout de celle-ci, un événement se déclenche. Il peut être propre au joueur (construction d’un lieu de culte, caravane de dromadaires) ou provoquer un conflit qui sera résolu région par région. Dans ce dernier, les joueurs pourront jouer des cartes pour faire tourner l’affrontement en leur faveur.
De tous les dieux, c’est à celui de l’Anticipation qu’il faudra vouer votre culte…
Vous l’avez compris, Ankh : les Dieux d’Egypte est délicieusement calculatoire. Sous ses dehors à la fois simples et somptueux, il cache un jeu où chaque décision pourra se révéler capitale dans la course à la domination. Déjà, le choix des actions est incroyablement subtil car il faudra réussir à développer son jeu tout en privant ses adversaires des événements favorables (voire en les forçant à vous les offrir). Ensuite, aussi anodin puisse-t-il paraître, chaque déplacement sur le plateau pourra faire basculer les fragiles majorités établies ça et là. Et enfin, il faudra savoir équilibrer son jeu pour être présent dans les régions choisies tout en n’oubliant pas de développer les pouvoirs de son dieu (ce qui, accessoirement, vous permettra aussi d’intégrer de puissants gardiens à votre armée de croyants).
Mais au-delà de cette mécanique d’action rudement efficace, Anh : les Dieux d’Egypte s’est aussi vu doter de différentes mécaniques connexes qui apportent elles-aussi leur pierre à l’édifice (religieux, cela va sans dire). Le fait que chaque joueur dispose de la même main de cartes permet par exemple d’anticiper les choix de chacun et fait même souffler un petit vent de bluff sur la partie. Par ailleurs, grâce au système de fusion, les deux joueurs les moins bien embarqués ne feront plus qu’un à l’approche de la fin de la partie. Et voilà une sorte de dieu hybride à deux têtes qui grâce à ce petit coup de boost novateur pourrait bien revenir dans la partie (et pourquoi pas damer le pion fidèle au favori juste avant la ligne d’arrivée).
Rusé comme le Sphynx, puissant comme un pharaon… mais aussi beau comme Cléopâtre
En plus d’être (très) bon, Ankh : les Dieux d’Egypte est aussi (très) beau. Le plateau représente les plaines d’Egypte entrecoupées par le delta du Nil mais c’est véritablement quand la partie se développe que le jeu impose toute sa prestance sur la table. La boîte de base comporte une pléthore de figurines et si certains gardiens sont impressionnants (coucou les crocodiles et les scorpions géants), ce sont vraiment les figurines des dieux qui attirent le regard et flattent l’œil.
Et pour ne rien gâcher, plusieurs extensions devraient bientôt voir le jour en boutique et ajouteront de nouveaux gardiens, de nouveaux dieux et l’une d’entre elles pourrait même faire intervenir le personnage le plus puissant d’Egypte : le Pharaon.
En conclusion
Ankh : les Dieux d’Egypte est le digne successeur des précédents joyaux signés Eric M. Lang. Doté d’un matériel très soigné, le jeu est un régal à sortir et à manipuler. Cela dit, c’est avant tout par sa mécanique qu’il brille. En effet, très facile à comprendre et à prendre en main, Ankh : les Dieux d’Egypte n’en est pas moins un jeu aussi subtil que redoutablement tactique. Ici, aucune place n’est laissée au hasard et si le jeu saura récompenser les audacieux, c’est souvent aux plus fins stratèges qu’il offrira le trône du dieu unique.
Ankh : les Dieux d’Egypte, un jeu d’Eric M. Lang, illustré par Thierry Masson et Adrian Smith, édité par Edge / Cmon et distribué par Asmodée.
Nombre de joueurs : 2 à 5
Âge : dès 14 ans
Durée moyenne d’une partie : 1h30 à 2h
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