Retour des cinémas, et retour de Drunk en salles. Auréolé de l’Oscar du Meilleur film étranger, le dernier film du danois Thomas Vinterberg avec Mads Mikkelsen en tête d’affiche, est un petit bijou à voir absolument ! Et une bonne excuse pour se faire une toile…
Soif de vivre
Lassés d’une vie routinière, installés dans un train-train quotidien où l’ennui se mêle à la perte de confiance en soi, quatre amis, quatre profs, décident de mettre en pratique la théorie d’un psychologue norvégien selon laquelle l’homme aurait dès la naissance un déficit d’alcool dans le sang. Pour être heureux, profiter de la vie, il faudrait maintenir un taux minimum de 0,5g/L d’alcool dans le sang. Avec une rigueur scientifique, chacun va alors relever le défi en espérant que leur vie n’en sera que meilleure ! Si dans un premier temps les résultats sont encourageants, il se pourrait que la situation devienne rapidement hors de contrôle…
Le génial réalisateur de Festen, Thomas Vinterberg, n’avait plus vraiment marqué les esprits depuis La Chasse en 2012, avec Drunk il signe un retour éclatant. D’un postulat de départ aussi original et fort que simpliste, Vinterberg dresse le portrait de quatre hommes et de notre société dans le même temps. Car au-delà de « l’expérience », Drunk parle avant tout des désillusions, des blessures de la monotonie, du mal-être induit par la perte des libertés et à la jouissance de la jeunesse. Un métrage hybride dans sa construction et son propos, qui oscille entre la comédie (le film de potes) et le drame. Souvent drôle, toujours poignant, Drunk est un film enivrant, d’une grande intelligence ; presque un numéro d’équilibriste. Point question ici de faire l’éloge de l’alcool, tout du moins de celui consommé à l’excès, mais bien de louer et de dénoncer à la fois les effets de la cuite joyeuse sans jamais verser dans la facilité de la moralisation et de l’hypocrisie.
Par cette thérapie, les protagonistes reprennent goût à la vie, l’alcool n’étant que la révélation de leurs maux et non l’antidote. Une folle aventure, d’une euphorie communicative pleine d’optimisme, un hymne à la joie, à la légèreté : un élan de vie. Et plus en profondeur encore, le réalisateur touche du doigt le mal de notre époque : la dépression, la monotonie, l’aliénation par le travail. Ces quatre personnages attachants ne sont que de pauvres êtres tristes, qui ont oublié comment vivre et surtout aimer. Des êtres qui se sont perdus eux-mêmes mais également dans le cœur de leur entourage. Au plus proche de ses acteurs dans chacun de ses plans, Vinterberg capture des tranches de vie, des émotions, les rires comme les pleurs, l’allégresse comme la colère. Une mise en scène esthétiquement superbe que l’on pourrait presque qualifier de naturaliste, de vivante, tant elle réussit à capter des instants sur le vif.
Pour donner vie à ses personnages abîmés, à ce groupe de profs potes , Thomas Vinterberg a fait appel à un casting d’habitués de son cinéma, d’acteurs hors-pair, tous plus magnifiques et vrais les uns que les autres ; Thomas Bo Larsen, Magnus Millang, Lars Ranthe. Au cœur de ce casting, un acteur immense, l’un des meilleurs de notre époque : Mads Mikkelsen. Avec ce rôle puissant et son jeu d’une subtilité rare, Mads Mikkelsen remporte la mise. Tour à tour angoissé, déprimé, mélancolique, joyeux, enivré, l’acteur passe par tous les états et émotions avec un magnétisme impressionnant.
Entre comédie et drame, Drunk est un film enivrant, un tourbillon d’humanité, une fable douce-amère passionnante sur la vie et l’amitié. Malgré un sujet dur, Thomas Vinterberg délivre un film profondément optimiste qui fait un bien fou. Mads Mikkelsen porte ce savoureux cocktail aux côtés d’acteurs de talent. Santé !