Le sable chaud crisse sous une paire de santiags, le soleil à son zénith prolonge l’ombre de cowboys portant leur main à leur holster, prêts à dégainer leur six coups. Une légère brise souffle sur la rue principale emportant avec elle une boule de paille qui passe entre les tireurs qui se font face. Les regards se croisent, les visages sont fermés. Qui dégainera le premier ? Quelques secondes de silence, puis, les brigands font parler la poudre. Qui sortira vainqueur de cette passe d’armes ? Bienvenue à Gunny Town, une ville où tous les coups sont permis pour s’enrichir !
Le bon, la brute et le truand
Nous sommes au Far West en pleine ruée vers l’or. Un groupe de bandis entre dans Gunny Town, une petite ville en plein essor. Joueurs, entrepreneurs, braqueurs de banques, chasseurs de primes, viennent y investir les postes clés de la ville. Avec une seule ambition : devenir riches et puissants ! A chacun sa stratégie pour s’approprier Gunny Town, tous les coups sont permis.
A mi-chemin entre le jeu d’ambiance et le jeu de stratégie, Gunny Town est le dernier né de Mathieu Roussignol. L’auteur, après nous avoir fait incarner des pirates (le plaisant Terres Pirates) nous invite à incarner des cowboys. Et c’est dans un monde ouvert que les joueurs vont pouvoir déambuler pour s’en mettre plein les poches en remplissant diverses missions, et en dézinguant évidemment leurs adversaires.
Le but du jeu est simple, il vous faudra accomplir des missions pour atteindre 15 points de victoire. Pour se faire, les joueurs vont, à tour successifs, se déplacer, réaliser des actions, combattre et valider des missions. Le tout sur un plateau de jeu représentant Gunny Town avec ses rues et lieux emblématiques. Plusieurs actions sont possibles, il est tout d’abord possible de se déplacer (action obligatoire à chaque tour) de quatre cases ou de six à cheval. Suivant la case sur laquelle se trouve le pion (au départ ou à l’arrivée), il est également possible de réaliser des actions comme récolter de l’or, s’équiper (pour améliorer les armes et leur portée), acquérir des munissions ou des pépites, acheter ou braquer un commerce (ce qui permet ensuite d’avoir des actions gratuites sur la case), ou endosser un métier (shérif, notaire, soldat, médecin, bandit, et bien d’autres). Un ensemble d’actions qu’il faudra bien programmer avant de faire un déplacement. Tout en gardant à l’esprit qu’à tout moment, un joueur peut venir chaparder le commerce d’un autre, ou aller corrompre le juge pour faire perdre un métier à un adversaire.
Ensuite, chaque joueur peut réaliser des missions synonymes de gains de PV. Six missions sont communes à l’ensemble des participants, tandis qu’une est gardée secrète. Parmi celles-ci, il vous sera demandé d’endosser un certain métier pour réaliser telle ou telle action. Pour chaque mission commune validée, une nouvelle (plus corsée) la remplace.
Que serait un western sans une bonne fusillade me direz-vous ? Evidemment, Gunny Town n’oublie pas de proposer dans son panel de jeu le fameux duel où les balles sifflent de toutes parts. A chaque tour, possibilité est donnée de provoquer un adversaire en duel (à la condition de l’avoir en ligne de mire sur le plateau). Pour résoudre cette fusillade, chaque joueur sélectionne une de ses cartes tirs en main, la place face cachée avant de la révéler en même temps. Ces cartes représentent différentes zones du corps (tête, torse, bras, cuisse et jambe), celui ayant la carte de plus forte valeur remporte le duel. Il a alors le choix de faire perdre un point de vie à son adversaire et de valider une mission, ou de lui faire défausser un cheval. Dans tous les cas, le gagnant s’approprie le métier du perdant. S’il y a égalité, chacun perd un point. Si l’un des joueurs voit sa vie descendre à zéro, il est envoyé en prison. Dans ces duels, rapides et plaisants, tout sera question de bluff pour essayer de garder ses grosses cartouches en main.
La fin de la récrée est sifflée lorsque l’un des participants a atteint 15 points de victoire. Il est alors temps de comptabiliser les points amassés par chacun, celui qui en possède le plus remporte la partie.
Pour une poignée de dollars d’euros
Nous pourrions vous donner encore plus de détails sur Gunny Town tellement les possibilités sont multiples. Cela ne ferait que vous perdre en explications, et de vous faire passer à côté du plaisir de le découvrir. Le plus important à comprendre est que Gunny Town se veut un pur western avec ses bandits, ses lieux mythiques, ses fusillades. Un thème dont le choix fait sens, parfaitement maîtrisé et utilisé. C’est simple, on pourrait se croire dans la peau de Clint Eastwood prêt à dégainer !
Mais surtout, ce qui fait la force de ce jeu, c’ est sa grande sensation de liberté. A l’heure où les jeux se font de plus en plus complexes, où chaque action est précieuse et demande une réflexion poussée, Gunny Town apporte un vent de fraîcheur. Vous pouvez faire ce que vous voulez, à vous de décider de la route à suivre pour accéder à la victoire. Un grand bac à sable dans l’univers du Far-West, comme lorsqu’enfants nous jouions aux cowboys et aux indiens.
Facile à expliquer, rapide à jouer, il s’agit d’un jeu efficace qui peut plaire à toute la famille. Certains pourraient s’insurger de voir leur progéniture participer à des fusillades, mais les illustrations type « cartoon » permettent de lisser l’aspect violent des combats. Ne nous voilons pas la face d’ailleurs, nos enfants voient bien pire sur d’autres médias.
Seule ombre au tableau, la qualité du matériel est assez inégale. Si le plateau a assembler façon puzzle est bien pensé pour un rangement facile, son aspect fait un peu « cheap ». Ce qui se ressent aussi sur les autres éléments du jeu. Rien de rédhibitoire rassurez-vous, mais il est important de préciser ce point à l’heure où le travail d’édition est de plus en plus poussé dans l’univers ludique.
Bref, Gunny Town est une belle réussite, un vrai bon western comme on l’aime. Stratégique mais faisant la part belle à l’ambiance, il devrait plaire à toute la famille pour un prix assez raisonnable !
Gunny Town, un jeu de Mathieu Roussignol, illustré par Jean Brisset, édité par Roussignol Edition.
Nombre de joueurs : 3 à 6
Âge : à partir de 10 ans
Durée moyenne d’une partie : 30 à 45 mn