C’est un harmoniciste et chanteur franco-polonais, né à Varsovie en 1971.
Riche de talents multiples et d’un don d’harmonica, Greg Zlap assure aujourd’hui la première partie d’une tournée monumentale, celle de Johnny Hallyday. Et c’est au cours d’un concert à Nice, le 3 octobre dernier, que j’ai découvert cet harmoniciste hors norme capable de s’emparer de la scène et du public dès la première note jouée.
Ce bluesman est aussi un showman avéré, authentique et doué, à qui rien ne fait peur. Album, musiques de films, bande dessinée… Greg franchit tous les obstacles, bravant sa timidité et prouvant au monde musical que l’harmonica, ce petit instrument, au son aiguisé et incomparable, tient finalement une grande place.
Pour vous, Greg a accepté de répondre à mes questions.
Ton nouvel album Solidarnosc vient de sortir. Reçoit-il l’accueil que tu espérais ?
Je suis en première partie des concerts de Johnny, et ce qui est formidable c’est que le public réagit vraiment très bien. La nouveauté, pour moi, c’est que l’album soit en français, puisqu’avant je ne chantais qu’en anglais. En tout cas, je pense que les gens aiment car l’impact est incroyable. Le public écoute les paroles et j’ai l’impression qu’un lien se forme entre nous.
Selon moi, une chanson se démarque totalement des autres. Elle est sublime. C’est Faut pas que je t’aime.
Faut pas que je t’aime est une chanson d’amour qui parle du fait que l’on peut parfois s’emballer et aller trop loin. Pour l’anecdote, je me souviens m’être éveillé en plein milieu de la nuit, avec la mélodie en tête. Du coup, j’ai voulu cette chanson très intimiste, avec pour seul instrument la guitare.
Solidarnosc est, je crois, ton premier album entièrement en français. Cela veut-il dire qu’il est principalement destiné à ton public français ?
Oui. Cela fait plusieurs années que je travaille dessus. J’ai longtemps souhaité chanter en français, mais je n’osais pas. D’autant qu’il était plus facile et plus évident de chanter en anglais sur le style de musique que je jouais. C’est-à-dire du rock ou du blues. Mais depuis ma rencontre avec Johnny, mon public s’est agrandit. Je parlais au public entre les morceaux. L’envie était trop forte. Je devais chanter an français et j’ai passé le cap.
Je t’ai vu sur scène, où tu m’as l’air particulièrement à l’aise. Que préfères-tu ? Le studio ou la scène ? Si c’est la scène, peux-tu nous dire ce que celle-ci t’apporte ?
J’aime le studio pour le potentiel de création qu’il permet. Lorsque j’ai commencé dans ce métier, on m’a sollicité pour des enregistrements et c’est grâce à ces séances en studio que j’ai pu montrer de quoi j’étais capable et, surtout, ce que permettait l’harmonica. Et c’est pourquoi, par ailleurs, je suis heureux de pouvoir enregistrer de la musique classique pour Vladimir Cosma ou bien du rock’n’roll pour Johnny. J’aime la diversité qu’offre mon instrument. D’un autre côté, j’ai pris goût à la scène très tôt, et pour moi qui suis timide à la base, ce fut une vraie révélation. Ce que j’aime dans la scène, c’est son côté unique. En tournée, par exemple, c’est différent chaque soir. Le public n’est jamais le même. L’ambiance non plus n’est pas la même. Et ce sont justement ces moments uniques qui m’apportent cette motivation, cette énergie que je dégage sur scène.
As-tu le trac avant d’entrer en scène ?
Ah, oui ! C’est systématique. Mais c’est normal. C’est comme avant un rendez-vous important. On doit tout donner et ne pas s’économiser. Lors d’une séance de répétition, à mes débuts avec Johnny, je jouais Gabrielle devant lui qui, après la chanson, est venu me voir et m’a dit : c’était très bien, mais pitié, ne reste pas planté comme un piquet. Déplace-toi, remue ! C’est aussi ça, Johnny. C’est une locomotive. Il te transmet tellement d’énergie, tellement de puissante et tellement d’envie que tu le suis et fais le show ! Car une fois sur scène, que tu sois devant dix personnes ou huit-cent-mille, c’est pareil. Johnny ne fait aucune différence. Tu dois te donner à fond. Ne plus avoir de limite. Et le trac s’en va.
Vos univers ne sont donc pas tant différents que ça !
Musicalement, si. Ils sont différents. Mais si l’on se retrouve autant avec Johnny, c’est que notre passion pour le blues est la même. D’ailleurs, je me souviens de notre première rencontre où nous n’avons parlé que de blues, du bluesman, etc. Nos racines musicales sont identiques. Johnny m’a dit un jour : toi, Greg, tu joues très bien de l’harmonica mais ce qui est impressionnant, et rare, c’est que finalement on ne dirait pas que tu joues, mais que tu chantes dans ton harmonica ! C’était un vrai compliment pour moi.
As-tu d’autres projets de prévus avec Johnny ?
J’ai participé au prochain album de Johnny, enregistré en secret, qui sortira le 13 novembre 2015. Je suis très fier d’y avoir contribué.
Tu parles de ton pays d’origine, la Pologne, dans tes chansons. Tu y es donc très attaché ?
Oui, j’y suis attaché. Les racines, c’est très important. Je suis arrivé en France à dix-sept ans mais j’ai grandi en Pologne. J’ai une vision particulière des choses car j’ai vécu une période très intense au milieu des années quatre-vingt, durant les manifestations de Solidarnosc. Avec ma famille, nous vivions au quinzième étage d’un HLM au centre de Varsovie et je pouvais tout voir depuis ma fenêtre. Mon rêve, c’était la France, ou les Etats-Unis. Pour moi, c’était ça la liberté. Alors je visionnais des films. Et lorsque j’ai reçu mon premier harmonica, c’était comme toucher enfin ce rêve du bout du doigt. Il venait d’Amérique, rapporté par mon oncle, et j’étais fasciné par tout ce qui provenait de l’ouest. En quelques sortes (rire !), mon rêve Américain c’était de devenir un vrai Français !
Mon harmonica dans les bagages, j’ai suivi ma mère qui avait un poste à Paris et voilà, j’avais enfin accès aux magasins de musiques où je pouvais écouter ce que j’aimais, et même monter un groupe, et jouer ! C’était fascinant !
Pourquoi l’harmonica ?
Lorsque mon oncle m’a offert cet harmonica, je ne savais pas trop quoi en faire. D’autant plus qu’à cette époque, j’écoutais Kiss, et beaucoup de Hard rock. Puis je suis tombé un peu par hasard sur un morceau de blues et j’ai halluciné. Je ne comprenais pas comment il était possible de sortir de tels sons d’un si petit instrument. Alors j’ai travaillé, travaillé, puis j’ai trouvé une méthode et j’ai joué, joué, joué, et c’est devenu une passion qui ne m’a jamais quitté.
Joues-tu d’un autre instrument ?
Non ! Enfin, je me sers d’une guitare pour composer, mais pas pour m’accompagner sur scène ou dans mes albums. Seulement l’harmonica et ma voix ! L’harmonica est le seul instrument qui se joue en respirant. Il est devenu le prolongement de mon corps, il fait partie de moi. Si tu veux, ma voix et le son produit par mon harmonica viennent du même souffle.
Un prochain album uniquement composé de solos d’harmonica verra-t-il le jour un de ces quatre ?
Non, pas exactement. Solidarnosc qui vient juste de sortir est un album cinq titres qui est le prélude de l’album qui arrivera prochainement, en début d’année 2016.
Je sais que tu touches aussi à la bande dessinée.
Oui, j’adore l’art visuel. Étant plus jeune j’ai moi-même beaucoup dessiné, et en 2012 est publié aux éditions Glénat une bande dessinée, Harmonijka, dans laquelle je retrace mon parcours, de Varsovie au concert de Johnny à la tour Eiffel en 2009. J’y parle entre autres des coulisses de la scène, des préparations, des sensations ressenties lors d’un tel évènement, avec en parallèle des flashbacks. C’est ma biographie en dessins. C’est drôle d’être devenu le héros d’une bande dessinée !
Que puis-je te souhaiter de meilleur pour l’avenir ?
De continuer ! Je suis tellement heureux de pouvoir faire ce métier ! C’est une vraie chance ! J’ai pleins d’idées. J’ai pleins d’énergie ! Il faut surtout que ça continue !
DISCOGRAPHIE
2015 : Solidarnosc – EP
2011 : Air
2008 : Road Movie(s)
2005 : Varsovie
2002 : La Part du Diable
1999 : Gregtime
1997 : Ternaire Madness
BANDE DESSINEE
2012 : Harmonijka – Bande dessinée, auteurs : Greg Zlap, Philippe Charlot, Miras, éditions