Le studio de développement Français Spiders, existe depuis une petite quinzaine d’années et a sorti quelques jeux que je qualifierais d’AA et qui ne sont pas forcément connus des masses, mais qui avaient certaines qualités qui méritaient que l’on s’y attarde. Leur premier titre PS5, Steelrising, a l’ambition de débarquer dans le monde des Souls-like, et d’y apporter ses petites touches d’originalités, ainsi qu’un mode assistance qui permet d’affiner au mieux la difficulté du jeu par rapport aux capacités du joueur. Pari réussi ?
Facile ou difficile, telle est la question
C’est la mode depuis un moment, à chaque sortie d’un Souls-like, la question d’un mode facile est posée. La levée de boucliers des puristes calme régulièrement les ardeurs, comme si il était complétement indécent de demander un peu de finesse dans un monde aussi brutal. Tester Steelrising dans sa difficulté première est évidement une évidence, car le jeu fait clairement parti de cet univers si particulier, où la mort ne signifie plus un échec, mais un pas de plus vers la progression et la victoire.
Est-il cependant possible, en affinant certains critères, de rendre le jeu accessible à un plus grand nombre, sans dénaturer son essence même? Est ce que les obstacles posés sur la route du joueur, une fois retirés, transforment le jeu jusqu’à en perdre son intérêt ? Est ce qu’un jeu prévu pour faire tenir des dizaines d’heures en haleine devient inintéressant si sa durée se voit ainsi relativement réduite ?
De mon point de vue de testeur-rédacteur amateur, qui prend sur son temps libre pour évaluer un maximum de jeux et en essayant de ne pas empiéter sur le temps passé également en famille, je conçois de plus en plus difficilement de pouvoir passer 100h à mourir encore et encore, a progresser millimètre par millimètre, et à apprendre par cœur le pattern des ennemis en esperant avoir la dextérité nécessaire pour effectuer les contres et attaques de manière synchrone pour terrasser les ennemis.
C’est pourquoi j’ai décidé de tester Steelrising de deux manières distinctes. Quelques heures pour débuter, dans sa difficulté maximum, pour évaluer si le jeu appartient bien à la catégorie des Souls-like. Puis, une fois le constat effectué, j’ai entrepris de continuer le jeu en ajustant les paramètres sur les points qui sont pour moi, les plus bloquants pour une progression fluide dans l’histoire.
Quelques grammes d’ajustements, dans un monde si difficile
Bien entendu, il ne m’a pas fallu longtemps, pour comprendre que le jeu est bien difficile comme il se doit. On croise quelques ennemis que l’on bat assez facilement, on voit de suite les patterns des ennemis, volontairement désynchronisés sur nos attaques et contres. On suit l’intro-tuto en jubilant d’apprendre que l’on peut tuer discrètement les ennemis en one-shot en étant prudent. Arrive vite la première vestale, le fameux point de repos de tout Souls-like, permettant de gérer son inventaire, de refaire le stock de potions, d’améliorer son personnage en consommant les mânes et esprits libérés par les ennemis, et bien sur de faire respawn tous les ennemis alentours. Jusque la, on se prend au jeu, on profite des ennemis assez faible, pour refaire 3-4 nettoyages de zones, et monter son level tranquillement.
Prenant ensuite son courage, fier d’avoir un beau niveau 5 affiché dans sa fiche de personnage, on se dit qu’on va progresser un peu plus sur le niveau en cours. Premier « sous »-boss, première déconvenue. Ça tape fort, ça tape de manière très imprévue, et ça enchaine les attaques, au détriment de notre défense et esquives. Bien entendu, notre faible endurance ne permet pas de tenir très longtemps, et la première mort douloureuse arrive. Et on y retourne, le cœur vaillant, prêt a en découdre. Et deuxième mort, puis troisième, la résignation arrive vite, obligeant de reculer devant cet ennemi déjà si différent de ceux que l’on a pu croiser depuis le début. Et genre oblige, on revient dans la zone précédente pour faire progresser notre héroïne, et avoir un niveau un peu plus convenable pour terrasser notre nemesis. Bien entendu, fort de quelques niveaux supplémentaires, on y arrive finalement. 2-3 heures sont déjà passés, et on a encore rien vu du jeu.
Le diable a donc décidé de me tenter, un petit tour vers les options d’assistance (a ne pas confondre avec l’accessibilité présente dans d’autres jeux), et sur un coup de folie, tout les curseurs sont poussés à leurs maximums. Alors là bien sur, bienvenue dans le monde des Bisounours, les ennemis essaient désespérément de nous affliger le moindre dégâts, mais le god mode fait le job, et le jeu perd toute sa saveur, forcément.
Réflexion faite, il en devient évident qu’il va falloir calmer mes ardeurs.
Un second passage dans les options, pour décider de ce qui me faisait vraiment obstacle pour une progression correcte. Bien entendu, je passe d’un god mode, à un demi-god. Les dégâts réduits de moitié, les mânes conservés après une mort, l’endurance qui se recharge plus rapidement, et le refroidissement facilité après une surcharge sont des critères qui agissent de manière importante sur la difficulté du jeu.
Remarquez que l’on ne touche pas aux ennemis, ils ne seront pas moins agressifs, n’auront pas un pattern plus simple, ni ne fuiront devant notre toute puissance. Ils seront toujours la prêts à en découdre. Remarquez également le petit texte d’avertissement, qui indique que même si on nous lâche la bride, on ne sera pas non plus récompensé a 100% de nos efforts, avec certains trophées qui resteront inaccessible. Fair enough, comme dirait nos amis anglais.
Et c’est ainsi que j’ai continué mon aventure à travers les rues de Paris. Progressant plus vite, certes, mais sans néanmoins me sentir illégitime sur les pavés. Comme prévu, les ennemis ne perdent pas de leur hargne, les boss sont toujours une plaie, et les potions de vie sont bien consommées. Des morts ? Oui ça arrive toujours, car les enchainements relativement imprévisibles de certains ennemis, combinés parfois à des attaques groupées, font qu’il n’est pas toujours simple d’être un demi dieu dans la capitale. Mais on ressent beaucoup moins la frustration, voire la déception d’avoir perdu ses mânes en tombant dans les eaux profondes en esquivant un ennemi par exemple. On continue d’avancer, on prend plaisir à suivre l’histoire principale, et à faire les quelques quêtes annexes. La fin du jeu tombe forcément plus vite, mais reste très satisfaisante après malgré tout quelques 18 heures de jeu, chiffre tout à fait convenable pour une durée de vie en mode « facile », et sans faire toutes les quêtes annexes.
Aux armes, automates !
Aux prémices de la Révolution française, Spiders décide de revisiter l’histoire en introduisant une armé d’automates créés pour remplacer les soldats humains, et protéger les intérêts du Roi Louis XVI. Machines sans sentiments, ils sont forcément les plus à même a obéir aveuglement à la folie d’un homme. Vous incarnez l’une d’entre elle, Aegis, seule automate douée de la parole et assignée à la sécurité de la reine Marie-Antoinette, fortement opposée aux plans du Roi. Vous devrez donc parcourir les rues et quartiers de Paris, pour trouver votre créateur, et essayer de trouver la solution pour arrêter le massacre perpétrés par ses confrères pantins métalliques. Tout au long du jeu, vous rencontrerez de nombreux personnages historiques, comme La Fayette et Lavoisier, en passant par Robespierre et Marat, entre autres. De nombreux lieux emblématiques de Paris seront également de la partie, comme le Jardin des Tuileries, la Bastille, les Invalides, Montmartre ou Versailles. L’histoire est remarquablement travaillée, avec une cohérence historique plutôt bien respectée (si ce n’est les automates, bien sûr). Cela fait plaisir et change un peu des énigmatiques histoires, qu’il faut essayer de déchiffrer dans les notes et autres parchemins des jeux FromSoftware. On se croirait parfois presque dans un Assassin’s creed niveau historique et rencontre de personnages emblématiques de l’époque.
Un gameplay classique, mais efficace
Piochant bien plus du côté de Bloodborne que de Demon/Dark Souls, les contrôles d’Aegis sont rapides et répondent au quart de tour. On est bien souvent plus rapide que les ennemis qui compensent par des attaques dévastatrice, même si certains ont malgré tout des attaques à vélocité très élevé, qui surprenne parfois malgré leur imposant gabarit.
On retrouve les classiques attaque rapide, ou lourde, les esquives, et certaines armes ont des attaques secondaires permettant de faire des contres, ou se protéger. Quelques fusils sont également a notre disposition, même si leur efficacité est toute relative, due à une présence de munitions assez famélique. On peut en acheter un stock avec nos mânes lorsqu’on est à proximité d’une vestale, ou lorsqu’on change de quartier, mais on ne le fera probablement qu’une fois notre niveau bien monté, car entre la progression de nos capacités, et l’achat de munitions, le choix est vite vu. Certaines armes et objets peuvent également faire du subir des dégâts élémentaires sur les ennemis, qui sont forcément plus ou moins sensible selon chacun, il faudra donc apprendre à les utiliser correctement.
Niveau équipement, on trouve également des armes et des pièces d’équipements tout au long de l’aventure dans des coffres, et sur des boss. Il est également possible d’en acheter ou d’en vendre, sachant qu’encore une fois tout se négocie avec les mânes qui sont la « monnaie » de base du jeu. Vous pourrez également trouver des objets pour améliorer vos compétences, Aegis ayant 5 emplacements sous la forme de « boitiers », dans lesquels vous pourrez insérez différents modules pour renforcer votre vie, votre attaque, et d’autres caractéristiques au long du jeu, ces boitiers étant améliorables au fil de l’aventure avec des clefs de boitiers, trouvés sur les ennemis, ou disponible à l’achat.
Comme dans tout Souls-like, Aegis possède une barre d’endurance, dans laquelle elle pioche a chaque attaque, défense ou contre. Étant cependant un automate, l’endurance est assez virtuelle, et on peut rapidement recharger celle ci avec un bouton qu’il faut appuyer de manière rapide et précis, à l’instar d’un QTE. Un échec pourra cependant nous mettre en surcharge, demandant d’attendre quelques précieuses secondes avant de repartir, nous laissant exposé aux attaques de l’ennemi. C’est un ajout assez sympathique, en tenant compte de la particularité de notre héroïne.
En battant certains boss, vous débloquerez également des nouvelles capacités, comme un grappin, ou un bélier qui vous permet de débloquer certains passages, et progresser dans certaines portions de la carte inaccessible en début de partie. Vous avez également les fameuses portes à débloquer, qui permettent d’ajouter des raccourcis dans les niveaux pour progresser plus vite, surtout quand vous devez y revenir pour une quête annexe.
Une belle balade à Paris ?
Spiders ont fait un travail plutôt convenable pour représenter Paris au temps de la Révolution Française, on reconnait bien certains monuments phares, le moteur 3D est efficace, et certains endroits du jeux sont réellement impressionnants avec des effets de lumières très sympathiques. Les personnages sont également bien rendus, et les animations ingame sont très correctes, avec un petit décalage dans les mouvements d’Aegis qui donne bien l’impression d’un déplacement mécanique. Le jeu dispose de deux options de rendu, qui privilégient soit les graphismes, soit la fluidité. Personnellement testé avec l’option mettant en valeur les graphismes, j’ai pu constater que le jeu tourne malgré tout relativement bien, sans trop être gênant dans la fréquence d’images. Quelques bugs de collisions sont apparus pendant mes parties, et j’ai même été bloqué a un endroit du jeu, ce qui m’a demandé de relancer la partie. Rien de grave, même si ce genre de bug peut être légèrement gênant pour un Souls-like, car recharger une partie veut dire perdre la progression et ses mânes en passant…
Niveau audio, l’ambiance sonore est plutôt bonne, avec des musiques plutôt discrètes, évoluant lorsque des ennemis sont à proximité. Pour le doublage sonore, les voix sont de qualité, avec un doublage anglais sous titrés en français. On sourit avec ces quelques mots parfois dit en français, au court d’une phrase. On se demande surtout pourquoi Spiders, équipe de développement française je le rappelle, n’a cependant pas fait un doublage intégral en français, pour un jeu se déroulant en France. Ça fait malgré tout bizarre de voir tous ses personnages s’exprimer en anglais comme si c’était leur langue natale. Quelques bugs sonores sont aussi apparus pendant mes sessions de jeux, avec des voix qui disparaissent à plusieurs reprises, merci aux sous titres qui ont permis de suivre l’histoire sur ces moments-là. Malgré ces petits détails, le job est fait et jouer à Steelrising sur Playstation 5 reste plaisant.
Je ne suis pas venu pour souffrir, OK ?
Pour conclure, Steelrising est dans la veine des productions de FromSoftware. Calquant pas mal de choses sur le fonctionnement typique des Souls-like, il se permet malgré tout d’innover sur certains points qui rendent le jeu intéressant à faire et avec un scénario enfin agréable à suivre. Probablement un poil moins difficile que d’autres titres, surtout pour les habitués du genre, il reste punitif pour ceux qui souhaiteraient tenter l’aventure pour la première fois. Heureusement, Spiders l’a bien compris, et offre des options de personnalisation de la difficulté bienvenues, permettant enfin d’allier plaisir de jeu, et challenge mesuré. J’encourage vivement FromSoftware (même s’ils ne me liront probablement jamais) à envisager l’ajout de genre de fonctionnalité dans leurs titres à l’avenir quoi qu’en dise les puristes. Je surveillerais de près le prochain titre du studio, car ils ont vraiment un potentiel très intéressant et maitrise plutôt bien la new gen de consoles. Un quasi-sans faute pour ma part.