C’est sans débat, « The Thing » de John Carpenter est un pur chef d’œuvre (n’essayez pas, c’est sans débat on a dit !). Près de 40 ans après sa sortie, le film reste une référence en matière de maîtrise de la tension et de huis-clos horrifique. Et désormais, grâce aux éditions Matagot, le cauchemar venu de l’espace prend vie sur votre table. Pour vous, nous nous sommes armés de courage, de Moon Boots et de carburant pour motoneige et nous nous sommes plongés dans the Thing (avant que The Thing ne se plonge en nous)…
Petit récap’ pour ceux qui n’auraient pas révisé leurs classiques, l’action de The Thing se situe en 1982 dans une base scientifique perdue au cœur de l’Antarctique (le fameux Outpost 31). Là, par un jour neigeux comme tant d’autres, l’équipe recueille un chien (pourtant poursuivi par un norvégien armé d’un fusil, il y avait de quoi se poser des questions). Un chien ? Oui alors pas vraiment. Plutôt une forme alien particulièrement agressive capable de se dupliquer à la perfection en n’importe quelle forme de vie. A partir de là, il ne faut pas plus de quelques cadavres aux scientifiques pour comprendre qu’ils ont fait entrer le loup dans la bergerie (ou en l’occurrence l’Alien dans la base de recherche). Et comme n’importe qui peut très bien ne pas être celui qu’il prétend être, l’ambiance tourne vite à la paranoïa et se mue en fête annuelle de la suspicion…
La confiance, ça se gagne. Et puis ça se trahit.
The Thing est un jeu à identité cachée au sein duquel les joueurs vont incarner les personnages du film éponyme (oui, dont Kurt Russel, ne vous battez pas). Au début de la partie, un seul joueur est infecté et le jeu opposera donc deux camps, celui des Aliens et celui des êtres humains. L’objectif de ces derniers sera de réussir à fuir la base avant d’être complètement gelés ou d’avoir été tous assimilés. Mais attention, si par mégarde un Alien caché réussissait à intégrer l’équipe fuyarde, il répandrait son abomination sur le reste de la terre et les humains perdraient la partie. Il s’agit donc de fuir mais tout en étant bien accompagné (et seulement bien accompagné).
Tout au long de la partie, les joueurs vont se déplacer dans la base et tenter d’entreprendre des actions comme réparer le générateur ou la chaufferie, les saboter, s’armer (c’est toujours utile quand la version démoniaque d’E.T. est susceptible d’avoir pris l’apparence de votre copain de chambrée) ou encore envoyer un SOS. Le hic, c’est que tous ces mouvements créent des rencontres et qui dit rencontre dit contamination potentielle. En effet, quand deux personnages ou plus se trouvent dans une même pièce, un test d’infection est résolu, celui-ci pouvant faire secrètement basculer un personnage humain dans le camp des Aliens.
Je ne suis pas paranoïaque ! Je me méfie seulement de vous tous. De vous tous et des chiens.
Dans le film de John Carpenter, l’ambiance était étouffante et le spectateur, quand il n’était pas occupé à se régaler des géniales scènes burlesquo-gores, se demandait en permanence lequel des personnages n’était pas vraiment celui qu’il prétendait être. Eh bien cette ambiance est retranscrite à la perfection dans le jeu. Toute la mécanique est articulée autour de la suspicion qui va naître entre les joueurs. Entre le capitaine qui va distribuer les actions aux différents joueurs ou le vrai-faux bon samaritain qui rejoindra systématiquement des pièces occupées sous prétexte que « l’action est plus efficace si elle est réalisée à plusieurs », il ne faudra pas plus de quelques minutes pour qu’une paranoïa délirante s’empare de votre table de jeu.
Et le petit plus est que cette ambiance de méfiance feutrée peut tout à coup basculer en combat frontal au cœur de la station polaire. En effet, pour peu qu’un Alien sente qu’il ne va plus tarder à être démasqué (ou à être confondu par une analyse de sang ou de réaction à la chaleur), il peut se révéler. A partir de là, son objectif devient limpide : traquer les personnages humains jusque dans les moindres recoins de l’Outpost 31 pour les boulotter sans vergogne. Et quant aux humains, eh bien il faudra tenir ! Tenir pour mieux s’enfuir…
En conclusion
Lorsque nous étions enfants, The Thing nous avait particulièrement marqués (et traumatisés mais c’est une autre histoire). Du coup, c’est avec autant d’enthousiasme que de crainte que nous avons accueilli la nouvelle de l’arrivée d’un jeu à identité cachée promettant de nous replonger dans l’ambiance du film. Celui-là allait-il être à la hauteur ou cherchait-il simplement à surfer sur la notoriété d’un grand nom du genre horrifique ? Eh bien force est de reconnaître que le jeu est réussi (et même très réussi). Les mécaniques sont inventives et efficaces et l’ambiance du film, comme nous le disions, est admirablement bien rendue. Le matériel participe pleinement à l’immersion dans le froid polaire de l’Antarctique et sinon un livret de règles perfectible, l’ensemble est très séduisant. Ah, et un dernier point à noter car ce n’est pas courant, The Thing dispose d’un mode solo étonnamment bien pensé. Pour un jeu qui est à la base un jeu à identité masquée, c’est un sacré tour de force qui méritait d’être souligné !
The Thing – The Boardgame, un jeu d’Andrea Crespi et Giuseppe Cicero, illustré par Davide Corsi, Riccardo Crosa, et Mathias Mazzetti, édité en version originale par Pendragon Games et en version française par Matagot.
Nombre de joueurs : 1 à 8
Âge : dès 13 ans
Durée moyenne d’une partie : 90 minutes