Wes Anderson revient avec le très attendu Asteroid City, qui ne manque pas de fasciner autant que de décevoir.
L’absurdité à son paroxysme
L’une des qualités des films de Wes Anderson est l’absurdité qui en ressort. Beaucoup de dialogues n’ont pas de sens, d’autres sortent du contexte de l’intrigue, d’autres sont débités à des vitesses phénoménales… Ces procédés donnent lieu à des situations rocambolesques et très amusantes : le spectateur sort complètement du réel pour plonger dans un endroit purement fictif, où tout est possible. Chaque action est parfaitement montrée par les légers et rapides panoramiques. Les travellings, eux, permettent une vue d’ensemble sur cette ville pour le moins étonnante.
Seulement, ces moments absurdes se répètent et peuvent lasser le spectateur, car l’intrigue s’éclipse pour se détacher en des branches différentes. Il se passe beaucoup trop de choses et l’on se perd dans le récit… Il est même difficile de se souvenir de l’intrigue principal après le visionnage !
Abîme ou réalité ?
Par contre, on ne peut jamais être déçu sur le visuel lorsque l’on regarde un film de Wes Anderson ! C’est un cinéaste unique, qui connaît parfaitement son métier (pour notre plus grand plaisir esthétique). Asteroid City présente une mise en scène organique, avec une lumière omniprésente et, surtout, assaillante. Les couleurs sont chaudes et saturées ; elles pénètrent la chair des acteurs qui ressortent encore plus avec le décor. Quelques couleurs vives créent cependant un effet contrasté délectable : je pense notamment au rouge à lèvres de Scarlett Johansson qui détonne dans le paysage.
Par ailleurs, Wes Anderson possède un vrai sens du spectacle : cette idée de lier les moyens du cinéma à ceux du théâtre est géniale. Même si elle n’est pas nouvelle, l’approche du cinéaste est intéressante. En effet, le cadre se ra-petit lorsque les personnages sont dans les coulisses et l’image devient noire et blanche ; la rupture est nette entre les deux mondes. Cette rupture entre le monde « réel » de la scène de théâtre et celui de la fiction est superbe, d’autant plus que les personnages de la fiction nous paraissent réels même si on voit leurs comédiens sur la scène de théâtre.
Des acteurs : en veux-tu en voilà !
Les célébrités se bousculent dans Asteroid City. Scarlett Johansson, Adrien Brody, Edward Norton, Maya Hawke, Tom Hanks, Bryan Cranston, Steve Carell, Willem Dafoe, Margot Robbie, Tilda Swinton et j’en passe… il y a tellement de personnages qu’il est impossible de vraiment s’attacher à l’un d’eux. Toutefois, Augie Steenbeck et sa famille restent le centre de l’oeuvre et apportent de la tangibilité au récit. Ils sont en pleine période de deuil et tentent d’accepter une réalité trop dure à encaisser.
Comme souvent chez Wes Anderson, ses personnages sont mécaniques, et tant de personnages signifie fatalement un manque de développement psychologique. C’est pour cela que la famille d’Augie fait du bien dans le film. A titre d’exemple, on apprend que Schubert Green (le personnage joué par Adrien Brody) est en pleine instance de divorce : on n’en saura pas plus sur ce personnage. Pareil pour Steve Carell, dont le personnage est complètement inutile… En définitive, comme les personnages sont souvent semblables, la surprise n’est jamais au rendez-vous.