Vous avez envie de tenter de faire survivre votre tribu à la rudesse de l’hiver préhistorique ? Vous avez toujours rêvé de chasser le mammouth ou l’auroch ? Vous vous sentez l’âme d’un gardien du savoir et vous aspirez à laisser une trace de votre passage sur cette terre ? Alors, bienvenue dans Doggerland…
Le saviez-vous ? Il y a 15.000 ans, à la fin de la dernière grande période glaciaire, un large territoire nommé le Doggerland occupait ce qui est aujourd’hui la Manche et une partie de la Mer du Nord. Bien que son climat fût rude, cette terre était fertile et de nombreux hommes préhistoriques y avaient élu domicile. Vêtus d’épaisses fourrures pour se protéger du froid, ces hommes vivaient principalement de la chasse et de la cueillette… Mais bon, arrêtons-nous là. Si vous aviez voulu un cours d’histoire-géo, vous auriez probablement appelé Mr Pierrard, votre prof de CM2, au lieu d’atterrir sur ces pages. Cessons donc d’étudier les courageuses peuplades qui bravaient le froid du Doggerland pour mieux nous glisser sous leurs peaux de bête…
Chasser le renne, c’est bien mais chasser du point, c’est mieux !
Doggerland est un (énorme) jeu de programmation et de placement d’ouvriers. Il prend la forme d’un grand plateau central que les joueurs exploreront en quête de ressources à récolter et d’animaux à chasser. Chacun d’eux sera également muni d’un très complet plateau personnel où il s’agira de gérer ses provisions, de loger les membres de sa tribu et d’améliorer leurs capacités. Le but ultime sera évidemment de laisser une trace dans l’histoire et de faire passer sa peuplade à la postérité. Plus facile à dire qu’à faire…
En effet, très bien ancré dans son thème, Doggerland va proposer aux joueurs une multitude d’actions mais si la chasse au scoring demeurera l’objectif final, aucun d’eux ne pourra faire l’économie d’un enjeu au moins aussi important : sa propre survie… A chaque manche, les joueurs vont donc procéder à une phase de programmation où ils choisiront les tâches auxquelles ils vont affecter les membres de leur tribu. Il pourra s’agir de construire un habitat, de peindre une fresque sur le mur de la grotte, de réaliser de l’artisanat, de demander une action particulière à sa chamane, d’encourager la reproduction (on a toujours besoin de plus de bras) et bien sûr d’aller glaner des ressources et de chasser des animaux sur le plateau central.
La prévoyance, garante de votre survie…
Cette dernière action – celle d’agir sur le plateau principal – est évidemment essentielle car si la majorité des autres sera pourvoyeuse de points, c’est bien celle-ci qui vous fournira tout ce dont vous aurez besoin pour les réaliser. On ne construit en effet pas de nouveaux habitats sans pierres ni bois, on ne s’aventure pas à l’extérieur sans une fourrure bien épaisse (particulièrement lors des saisons froides, c’est-à-dire la moitié du jeu), on ne peint pas une fresque sans avoir le matériel adéquat, etc., etc.
Vous l’avez compris, l’aspect programmation s’avérera vite être la clef de voûte de Doggerland. Bien sûr, vous aurez le loisir de choisir l’ordre dans lequel vous effectuerez les actions que vous aurez programmées mais il faudra vous assurer de disposer de suffisamment de ressources pour ce faire. Le tout, en pensant aussi à en conserver une partie pour nourrir votre peuple (et ce, d’autant que les denrées s’abîment au fur et à mesure des tours et finissent par être inconsommables – mais quand diable avons-nous finalement eu la bonne idée d’inventer le réfrigérateur ?).
Bien dans sont thème et beau comme un coucher de soleil sur la plaine inondable
Ce sont là deux grands atouts de Doggerland. D’abord, le jeu s’ancre parfaitement dans son thème. Sa mécanique est fluide et il est perclus de petites bonnes idées qui démontrent tout le soin que ses auteurs ont voulu y apporter. Des exemples ? La migration des grands animaux entre chaque tour, l’obligation d’aller explorer toujours plus loin en raison de l’amenuisement des ressources, les contraintes de nourriture et de logements pour les membres de la tribu (qui ne s’appliquent d’ailleurs pas immédiatement aux nouveau-nés), l’obligation d’avoir chassé un animal avant de pouvoir le peindre sur la fresque de sa grotte ou encore la capacité limitée de nos courageux chasseurs à ramener leur butin (Chuck Norris n’ayant pas vécu à la préhistoire, aucun homme n’aurait été capable de ramener seul une carcasse de mammouth vers le campement).
Ensuite, le jeu est beau. Et même très beau. Cela se ressent dès l’ouverture du livret de règles dont les segments ont même été entrecoupés par des planches de bande-dessinée histoire de nous embarquer immédiatement dans le thème. Et tout le reste est à l’avenant, des illustrations des plateaux aux meeples animaux en passant par les très nombreuses tuiles, nous n’avons trouvé aucune fausse note. C’est d’ailleurs toujours un plaisir de s’y replonger…
Et puisqu’on en parle, il est l’heure pour nous de réenfiler notre peau de bête. Des traces dans la neige fraiche montrent qu’un troupeau de rennes est passé par ici. Voilà une belle occasion de faire le plein de nourriture. Ce ne sera pas de trop vu que la chamane a réussi à faire naître des jumeaux pas plus tard que la nuit dernière…
Doggerland, un jeu de Laurent Guilbert et Jérôme D. Snowrchoff, illustré par Emmanuel Roudier et Yvan Villeneuve, édité par Super Meeple et distribué en Belgique par Geronimo Games/
Nombre de joueurs : 1 à 4
Âge : dès 14 ans
Durée moyenne d’une partie : 1h30 à 2h