Après le succès en demi-teinte de Batman V Superman, c’est au tour de Marvel de proposer un duel entre super-héros. A l’occasion de la sortie en Blu-ray, Blu-Ray 3D, Vidéo à la Demande et DVD de Captain America Civil War, nous avons eu le plaisir de recevoir Dan DeLeeuw, directeur des effets spéciaux sur le film, nominé en 2015 aux Oscars dans la catégorie « Meilleurs Effets Spéciaux ».

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Dan Deleeuw à la cérémonie des Oscars. @GettyImage

Brian : Bonjour M. Deleeuw, merci de nous accorder quelques minutes de votre temps. Pour une fois, nous avons une réelle confrontation entre héros, pour ne pas parler du dernier film de votre principal concurrent, DC Comics. Du coup, il serait plutôt difficile d’entamer cette interview sans vous demander si vous êtes plutôt #TeamCaptain ou #TeamIronMan ?

Dan : Bonjour Brian ! Je serais tenté de dire #TeamCaptain. C’est mon deuxième film avec cette franchise, forcément on commence à s’attacher au personnage.

B : Justement, il s’agit de votre seconde collaboration avec les Frères Russo, les réalisateurs des deux derniers Captain America. Est-il difficile de composer avec le style Russo, caractérisé par des plans très courts, et beaucoup de mouvement ?

D : Tourner Winter Soldier n’a pas été de tout repos. Quand nous avons commencé à travailler sur Civil War, je savais déjà le type de prise de vue qu’ils aimaient ou le montage qu’ils préféraient. Cette seconde collaboration nous a permis d’être plus efficaces, et d’aller encore plus loin dans nos idées, notamment pour les grandes séquences.

B : J’ai eu l’occasion de m’entretenir avec Shepherd Frankel, alors qu’il était directeur des décors d’Ant-Man. Il m’a confié qu’il avait de plus en plus besoin d’inclure des écrans verts dans ses décors. Pourriez vous rapidement nous résumer les différentes étapes de la création d’effets spéciaux ?

H : Pour ce qui est du placement des écrans verts, nous faisons en général une grande réunion préliminaire avec les différents départements concernés. Nous retrouvons la plupart du temps le département des décors, celui des effets spéciaux et l’équipe en charge des cascades. Au cours de cette entrevue, nous abordons les aspects pratiques de la mise en place de ces écrans, afin de préparer les effets spéciaux. Les Frères Russo voulaient garder les pieds sur terre, et surtout que le film ai l’air aussi réel que possible. Mais pour les films de superhéros, il y a des choses que nous ne pouvons pas réaliser, comme avoir un immense Ant-Man de 8 mètres de haut, ou détruire un aéroport. À partir de ce constat, il est nécessaire de faire une liste de ce qu’il est possible de faire sur le lieu de tournage, et de ce qui ne l’est pas. C’est à ce moment que les effets spéciaux entrent en jeu.
Nous travaillons beaucoup avant et pendant le tournage en faisant de la prévisualisation. Ce n’est qu’après que sont ajoutées les animations générées à l’aide de l’informatique (ndlr. abrégé CGI pour Computer Generated Imagery). Pour la scène de l’aéroport, nous sommes allés à l’aéroport de Leipzig-Halle, en Allemagne, afin de le scanner et d’en produire une version digitale. Nous avons eu avoir recours à un grand nombre d’écrans verts placés sur des murs de bétons, ou sur des supports. Nous avons ensuite créé différents objets grâce à des outils numériques, comme des superhéros ou des effets de destruction, que nous avons ajouté en plein milieu de l’action, dans la version numérique de l’aéroport.

B : Je pense que nous pouvons tous nous accorder pour dire que la scène de l’aéroport était un point clé dans le film, démontrant une réelle maîtrise des effets spéciaux. Avez-vous développé de nouvelles techniques pour ce film ?

H :  Ce qui est très intéressant quand l’on travaille avec Marvel, c’est que l’on a accès à une réelle compétence et maîtrise émanant du passif du Studio. Quand on a besoin d’informations pour Ant-Man, on consulte l’équipe qui était en charge du film, de même si l’on a une question sur l’armure d’Iron Man. Nous avons donc eu la possibilité d’extraire les connaissances de tous les films qui ont été crées par le studio. Pour celui-ci, le challenge provenait de la création de grandes séquences comme celle de l’aéroport. Les frères Russo voient toujours les choses en grand, il s’agit de toujours repousser les limites en manipulant les échelles. Pour Civil War, il s’agissait de faire combattre 12 héros, tout en détruisant un aéroport entièrement réalisé numériquement. Donc, nous avons bien entendu un peu plus repoussé les limites de la création en voyant plus grand, mais nous avons surtout composé avec les connaissances de plusieurs films.

Captain America: Civil War Exclusive Behind The Scenes. @iamag
Captain America: Civil War Exclusive Behind The Scenes. @iamag

B : Mais du coup, vous utilisez principalement des costumes en image de synthèse, ou des véritables costumes ?

H : Lors de la création d’un film comme Avengers ou Captain America Civil War, nous possédons une version numérique de chaque héros. Nous scannons les acteurs et prenons des photos d’eux afin d’avoir un rendu numérique en armure.
Les héros qui volent ou qui sont dans des combats sont bien souvent difficiles à filmer, c’est pour cela que nous utilisons une version numérique. Sinon, l’idée est d’avoir le plus souvent possible recours aux acteurs en live.
Pour Civil War, nous avons eu quelques difficultés à reproduire le personnage de Black Panther. Nous l’avons filmé dans son costume, mais nous avions l’ambition de coller au maximum aux personnages des comics. Dans l’histoire originelle, l’armure est faite de couches de Vibranium, qui donnent au costume une allure spéciale qu’il est impossible de recréer sur le lieu de tournage. Il nous a donc fallu fondre la performance de l’acteur dans la version numérique afin d’obtenir l’éclat que crée le Vibranium contenu dans le costume.

B : Vous avez commencé votre carrière à Hollywood en 1993 avec Les Trois Mousquetaires de Stephen Herek. Est-ce que votre travail a réellement changé en 20 ans ?

H : Quand j’ai commencé, au Studio Dreamquest, j’ai eu beaucoup de chance car ils venaient juste de créer un scanner, qui nous permettait d’inclure de la 3D sur une pellicule. Mais nous avions toujours les départements des maquettes, des décors, des matte paintings. Ces techniques étaient très utiles à l’époque, avant l’arrivée de l’imagerie par ordinateur, et c’est celles-ci qui m’ont donné envie de faire ce métier. Au fil des années, la technique a évoluée, nous nous sommes rendus compte que les matte paintings pouvaient se faire par ordinateur, et nous avons donc fermé ce département. Je me sens très chanceux d’avoir pu commencer ma carrière à cette époque, et de vivre ce changement de technique. Je me rappelle avoir commencé sur un ordinateur qui coûtait 40’000$, et sur un logiciel qui en coutait 40’000$ aussi. Il fallait une nuit pour avoir le rendu d’une simple torpille, d’un simple tube allant dans l’eau. Aujourd’hui, il est totalement concevable de créer un aéroport, y ajouter des superhéros, et avoir des explosions de partout, et le tout en une nuit.

B : J’ai lu que votre film préféré était Indiana Jones et les Aventuriers de l’Arche Perdue. Vous ne seriez-pas un peu nostalgique des anciennes techniques quand même ?

H : Il y a du bon dans les deux conceptions des effets spéciaux. Mais je dois avouer qu’avant on avait souvent besoin de faire exploser des maquettes pour tourner certaines scènes, et ça me manque un peu. Remarquez, aujourd’hui quand on le fait, on le fait à plus grande échelle, et ça c’est bien.

B : Vous avez été nommé à la 87ème édition des Oscars dans la catégorie « Meilleurs Effets Visuels » avec Russell Earl, Bryan Grill and Dan Sudick. Toutes nos félicitations pour cette prouesse. Qu’est-ce qui, selon vous, a motivé vos pairs à vos sélectionner pour figurer dans cette compétition ?

H : Je pense que tout le monde a fait un excellent boulot sur Winter Soldier. Les Frères Russo ont vraiment fait en sorte de garder les pieds sur Terre pour ce film. Nous avons tenté d’utiliser au maximum le réel comme base aux effets spéciaux, ce qui a apporté un côté réaliste, tout en utilisant des techniques de pointe.

B : J’imagine que vous travaillez sur un projet en ce moment ?

H : Oui, pour l’instant c’est Top Secret !

B : Merci de nous avoir accordé de votre temps, 

H : Merci à vous, à bientôt !

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