L’Ombre de Fafnir, père des dragons, se répand sur Nidavellir et trouble la quiétude des Nains et Naines qui peuplent le royaume qui vivait en paix depuis des millénaires. De terribles grondements secouent les fondations des cités naines, tandis que des flammes infernales déchirent le ciel ; le mal est en chemin. Les vénérables Elvalands sont missionnés par le Roi pour sillonner le Royaume pour engager les nains les plus habiles et ainsi constituer le bataillon le plus à même de vaincre leur ennemi mortel. A vos pièces Elvalands car il va falloir miser pour dénicher les meilleurs nains tapis dans les tavernes, une chope de bière à la main !
Ni passé, Nidavellir
Malgré un ennemi commun, les joueurs qui incarnent les Elvaldands ne vont pas coopérer dans Nidavellir mais s’affronter. En tant que vénérable Elvaland, membre du conseil et chef de guerre respecté, les joueurs vont se tirer la bourre pour engager les nains les plus habiles ou recruter les héros les plus prestigieux, le tout en dépensant sans compter. Celui qui aura constitué l’armée ayant la valeur finale de bravoure la plus haute se verra honoré par le Roi (et gagnera la partie), tandis que ceux qui n’auraient levé qu’une armée de loqueteux se verront châtier !
La mécanique de jeu est assez simple en apparence mais redoutable d’efficacité lorsque l’on creuse un peu plus loin la réflexion. Dans le monde des jeux de société, vous l’aurez certainement remarqué, on aime les termes techniques, pour Nidavellir on parle d’un système de Coin-Building. Qu’est-ce que ça veut dire ? De la même manière que l’on construirait et améliorerait un deck de cartes dans un Deckbuilding, ici, nous allons améliorer nos valeurs de pièces (coins en anglais) au fur et à mesure. Ces pièces serviront aux joueurs à enchérir sur des cartes de nains qu’il faudra recruter. A la mécanique de Coin-Building s’ajoute donc celle de la collection.
Regardons maintenant de plus près comment le jeu fonctionne. En début de partie, chaque joueur reçoit cinq pièces de valeurs équivalentes (0 à 5), sonnantes et trébuchantes qui viennent rejoindre son trésor (bien maigre) de guerre. Au centre de la table sont placées trois tuiles tavernes de couleurs verte, rouge et bleue. On pioche et place ensuite un nombre de cartes nains équivalents au nombre de joueurs face visible dans chacune de ces tavernes. Puis les joueurs vont devoir, en même temps, faire des mises en plaçant leurs pièces sur chaque taverne de leur plateau de jeu. Les deux pièces non utilisées sont placées dans la bourse, face cachée, sous le plateau individuel. Cette phase d’action effectuée, il est temps de passer à la résolution. Taverne par taverne, leur ordre étant rappelé par des choppes de bière (on parle de nains guerriers nom d’une corne de bouc !), les joueurs révèlent leur mise. L’Elvaland qui a la plus grande valeur peut alors choisir son nain à recruter en premier. Il place cette carte dans son armée dans la colonne de la classe correspondante. Et ainsi de suite pour les autres joueurs. Enfin, lorsqu’un joueur révèle la pièce de valeur 0, celle-ci lui permet d’additionner les valeurs des pièces placées dans sa bourse, de défausser la plus haute des deux pour l’échanger contre celle correspondant à la somme dans le trésor royal. A savoir que quelques cartes permettent également d’augmenter directement la valeur d’une pièce.
Les cartes de nains se distinguent par leur couleur qui correspond à des classes ; rouge pour les guerriers, vert pour les chasseurs, violet pour les forgerons, orange pour les mineurs, et bleu pour les explorateurs. Sur certaines classes, il sera fait mention de points de bravoures, sur d’autres d’un ou plusieurs grades, voire les deux. A chaque classe, sa méthode de calcul de points de bravoure ; par exemple, la valeur de bravoure des mineurs est égale à la somme de leurs points multiplié par le nombre de grades possédés. Pour les explorateurs, il s’agira tout simplement d’additionner les points de l’ensemble des cartes de cette classe. Grâce à ces différentes combinaisons, les joueurs vont cumuler des points de bravoure. Il sera donc judicieux de faire les bons choix leur du recrutement pour réaliser les meilleures combinaisons. Et ce n’est pas tout puisque lorsque votre armée comprend un nain de chaque classe, le joueur peut alors recruter un héros dont l’effet (jamais négligeable) apportera des points directement ou des grades (idéal pour augmenter le multiplicateur).
Pour résumer, chaque joueur mise des pièces sur les tavernes pour recruter des nains qu’il place dans son armée. A chaque tour de jeu, il a la possibilité d’augmenter la valeur d’une de ses pièces afin de s’assurer la possibilité de remporter des mises. Enfin, il peut recruter un héros pour chaque ligne de cartes comportant une classe de chaque type. Les tours s’enchaînent ainsi jusqu’à avoir épuisé la pioche de l’âge 1. Il est alors l’heure pour le Roi de faire une première évaluation des troupes. Le joueur qui possède la majorité pour une classe récupère une distinction. Certaines auront pour effet d’échanger des pièces, de gagner des grades pour une classe, ou de piocher une nouvelle carte à ajouter à son armée, etc. L’âge 2 peut alors commencer et se déroule de la même manière que le premier. A la fin de cette seconde manche, l’Elvaland ayant cumulé le plus de points de bravoure remporte la partie.
Nainporte quelle stratégie ?
La mécanique de Nidavellir peut sembler simpliste – miser, prendre une carte, échanger des pièces – et pourtant elle est bien plus profonde et stratégique qu’elle ne le laisse croire. Il s’agira de miser fort au bon moment pour prendre la carte qui, d’une part, pourra nous avantager, et d’autre part, désavantager les adversaire. Comme on le dit souvent, choisir c’est renoncer. Parfois, la décision pourra s’avérer difficile à prendre ; dois-je recruter ce nain qui me permettra de marquer plus de points avec telle classe ? Ou plutôt choisir cet autre nain qui ne me fera pas gagner beaucoup de points mais me permettra de compléter une ligne pour recruter un héros ? Et quel héros choisir ? Quel avantage chacun pourra m’apporter ? Parfois les choix se feront au feeling tandis que les matheux après quelques calculs rapides trouveront la solution la plus avantageuse. La réflexion est la même pour les pièces ; faut-il échanger au plus vite mes pièces de haute valeur pour augmenter rapidement mon trésor ? Ou plutôt garder quelques bonnes cartouches lors de ce tour pour acquérir les meilleures cartes ?
Chaque classe de nain (même chose pour les héros) comporte ses avantages/désavantages, l’équilibre est savamment dosé. Ce qui donne à Nidavellir un petit goût de reviens-y, à peine une partie terminée que l’on a envie de se replonger dedans pour tester une nouvelle stratégie. De quoi offrir une belle durée de vie avec des parties toutes différentes. On sent que le jeu a été testé et re-testé pour lui apporter un équilibre millimétré. A tel point que peu importe la configuration, à 2 comme à 5 joueurs Nidavellir fonctionne parfaitement !
La cerise sur le heaume
Un (très) bon jeu c’est bien, un beau jeu c’est encore mieux ! En plus d’être redoutablement efficace et frais dans sa mécanique, Nidavellir se paye le luxe d’avoir une édition soignée. Le matériel (ni trop, ni pas assez) est d’une qualité irréprochable et du plus bel effet avec son présentoir à pièces en 3D, tandis que les illustrations des nains tout en noir et blanc sont tout simplement superbes (chapeau l’artiste !) et font vivre la thématique médiévale-fantastique. Et, petit plus non négligeable, afin de faciliter le rébarbatif comptage des points une application est téléchargeable en ligne pour faire le boulot à notre place. Que demande le peuple ?
Enfin – c’est toujours un point important – les règles sont claires, précises et suffisamment détaillées avec quelques exemples judicieux en encart. Ce qui permet de se lancer rapidement dans une partie et d’expliquer le jeu aisément aux autres joueurs. Soulignons que les règles sont rédigées en écriture inclusive, un parti pris totalement assumé par l’éditeur qui ne plaira pas à tous. Nous ne débattrons pas sur le sujet, chacun aura son avis sur la question, de notre côté, nous avons trouvé que cela pouvait perturber la lisibilité des règles (notamment lors de la lecture à haute voix).
En bref, vous l’aurez compris Nidavellir à été un vrai coup de cœur ! Superbe, malin, addictif, il plaira à tout type de joueurs de l’amateur jusqu’au plus expert ; catégorie familial + donc. Chez nous, il a éclipsé pas mal d’autres titres pour se frayer une bonne place dans notre top des meilleurs jeux !
Nidavellir, un jeu de Serge Laget, illustré par Jean-Marie Minguez, et édité par Grrre Games.
Nombre de joueurs : 2 à 5
Âge : à partir de 10 ans
Durée moyenne d’une partie : 30 minutes à 1 heure