Fort du succès de son premier opus, The Isle Dragon Roars, la nouvelle franchise de Square Enix dirigée par Yoko Taro, créateur excentrique mais génial à l’origine notamment de la saga Drakengard et de ses célèbres spin-offs Nier et Nier : Automata, remet le couvert pour un second opus dédié à l’exploration et au voyage avec une touche de transition vers l’âge adulte.
Fidèle à son principe initial, le titre propose au joueur de vivre une aventure épique au sein d’un univers fantastique sous la forme d’un simple jeu de société. A la manière d’un Donjons & Dragons entre amis, un maître de jeu présentera terrains, personnages, évènements et monstres à affronter sous la forme de cartes, pions et autres dés. Si à l’écoute, cette présentation peut paraître un peu simpliste elle confère en réalité au jeu son atmosphère si particulière et son charme en laissant au joueur le plaisir d’imaginer les scènes narrées tout en profitant de l’ambiance sonore de très haute qualité.

En effet, Voice of Cards : The Forsaken Maiden se veut indéniablement chill et la bande sonore de Keiichi Okabe, fidèle partenaire de Yoko Taro sur ses titres les plus emblématiques, s’inscrit dans cette optique. C’est donc au son des vagues et enroulé dans un plaid douillet avec un chocolat chaud à la main que l’on lancera les dés pour découvrir la suite de notre aventure. Un jeu tranquille mais dont le scénario reste toutefois bien rythmé, enchainant les phases d’explorations allègres et les rebondissements scénaristiques tragiques.
Car si Forsaken Maiden propose une ambiance et un rythme plus lents que la plupart des RPG japonais classiques, son scénario, lui, reste fidèle aux thèmes sombres affectionnés par son auteur. On suivra ainsi avec plaisir et parfois un petit pincement au cœur le voyage de nos héros, épopée mélodramatique dévoilant le rôle essentiel, et le destin inéluctable, des Maidens, les prêtresses censées empêcher la destruction de chacune des îles visitées. Ici pas de voice actor ou de casting intégral de super star, l’intégralité des personnages sera narrée et jouée par le maitre du jeu, encore une fois pour nous maintenir dans l’ambiance. Et si l’on retrouve par moment des personnages presque clichés, tout droit sortis du premier JRPG venu, on se laissera toutefois agréablement surprendre par les retournements de situation et par l’évolution de certains personnages, présentant ainsi une histoire à la moralité pas toujours joyeuse et au scénario alambiqué plus complexe que ce que nos premiers pas dans l’univers du jeu pouvaient nous laisser entrevoir.
Enfin, et surtout, on se délectera sans cesse du style graphique de chaque carte, personnage et monstre, qui, sans ne cesser de nous rappeler un certain Nier dans le design de ses personnages, nous donnerait presque envie de posséder dans la vraie vie ce fameux deck aux artworks si délicats.

La Voix des Cartes !
The Forsaken Maiden est donc un jeu ostensiblement story driven qui ne se laissera pas toutefois conquérir par le premier venu. Le système de combat se veut simple et facile à appréhender, à la manière du premier opus : une arène toute de bois et de jetons faite remplace le terrain de cartes soigneusement constitué et votre groupe découvre alors les ennemis à affronter, leurs points de vie, d’attaque et de défense.
Chaque compétence spéciale et sort magique coutera un certain nombre de points de mana, représentés ici par une réserve de gemmes commune à l’ensemble du groupe. A chaque tour vos personnages génèrent une gemme et peuvent choisir d’attaquer ou de se concentrer pour générer une gemme supplémentaire (et donc envoyer la sauce au tour suivant façon Triple Full par les As).

Toutefois derrière l’apparente simplicité des premiers combats se cachent quelques ennemis parfois retors que le maitre du jeu prendra un malin plaisir à mettre en travers de votre route au travers d’affrontements dans la lignée du scénario principal ou d’évènements scriptés aléatoires rencontrés sur le plateau de jeu (mention spéciale au vaisseau fantôme de début de partie qui aura arraché quelques gouttes de sueur au testeur caché sous son plaid).
Cette volonté de pimenter par moment les scènes « d’action » pousse ainsi le joueur à ne pas complètement négliger son équipement ni les sets de compétences équipés sur vos héros, certains d’entre eux étant littéralement bloqués à l’utilisation d’armes ou d’armures spécifiques.
Ainsi cette volonté d’offrir un peu de piment dans les scènes d’action de Voice of Cards permet de transitionner sans jamais réellement s’ennuyer entre les différentes phases du scénario, complétant ainsi à la perfection l’expérience de jeu. Car que serait un bon D&D sans ces quelques affrontements épiques mettant votre tablée de joueurs au bord de la syncope ?
Si Voice of Cards : The Forsaken Maiden séduit, ce n’est donc pas parce qu’il est difficile ou parce qu’il vous demandera de réfléchir huit heures à votre prochaine action au risque de devoir reset. Non, Voice of Cards séduit par son univers enchanteur et dramatique tout à la fois, par son histoire d’apparence simpliste prête à vous poignarder en plein cœur lorsque vous vous y attendez le moins et par son système de jeu facile à prendre en main et qui rappeler à tout un chacun ces après midi familiales endiablées autour de la table à hurler sur une poignée de dés mal lunés.
C’est avec plaisir qu’on se plonge dans cette nouvelle aventure, ayant réussi à renouveler son concept et l’on a désormais qu’une hâte, c’est de voir ce que Square Enix et Yoko Taro réussiront à nous proposer sur les prochains opus.