Tous les médias en parlent, le présentent comme la mesure phare en matière formation professionnelle… Le Compte Personnel de la Formation entré en application le 1 janvier constituerait une réelle avancée dans le domaine de la formation professionnelle voire aux dires de certains « une révolution ». Mais qu’en est-il exactement ? Conso-Mag a enquêté pour vous.
« Le DIF est mort, vive le CPF »
L’histoire de la formation en France résulte d’un long cheminement mettant en œuvre des dispositifs de formation souvent complexes et peu lisibles pour l’ensemble des acteurs en dépit de multiples efforts. Le droit individuel à la formation, introduit par la loi de 2004 fut présenté par la grande majorité des praticiens comme un dispositif prometteur. Force a été de constater que le succès attendu n’était pas au rendez -vous et a même généré d’autres problématiques liées principalement à la portabilité du DIF .
Dix ans après son introduction, le dispositif était encore trop souvent méconnu des salariés du fait d’une rétention d’information par les petites et moyennes entreprises, espérant, à tort, gagner du temps. Dans le meilleur des cas (ce qui concernait surtout les grandes entreprises), l’information était transmise mais les refus au regard du nombre de demandes étaient importants avec un taux d’utilisation en chute libre qui profitait principalement au personnel le plus qualifié.
Le DIF, le « vilain petit canard » de la formation vient d’être remplacé par le Compte Personnel de Formation dont la mise en œuvre serait facilitée pour le salarié ….
Le CPF ou la copie améliorée du DIF
Les réelles avancées
A la lecture de l’ANI de 2013, le CPF se veut être un compte personnel, universel et unique.
- Personnel : il est attaché à la personne et non au contrat de travail alors qu’auparavant, le DIF (sauf cas particuliers) était attaché au contrat de travail. Du coup, vous perdiez vos droits à la formation dès que vous changiez d’employeur. Avec le CPF, vous conservez vos heures de formations quand bien même vous changeriez d’employeur ou si vous vous retrouvez sans emploi.
- Universel : il concerne aussi bien les salariés, que les chômeurs ou bien encore les retraités. Ici encore, le dispositif paraît plus juste.
- Unique : le compte reste le même de son entrée à la vie active jusqu’à la fin de sa vie mais attention, les heures non utilisées au titre du DIF devront être épurées dans les 6 ans sous peine de les perdre.
Enfin, un seul et unique dispositif ce qui facilitera sans aucun doute sa mise en œuvre contrairement au DIF.
Ainsi, ce dispositif se veut-il plus juste et plus simple et même plus avantageux pour les salariés puisqu’ils pourront cumuler jusqu’à 150 heures de formation dans la limite de 7 ans (soit 24 heures par an) contre 120 heures pour l’ancien dispositif.
Une mise en œuvre qui, à partir du moment où elle vise une formation en dehors du temps de travail, est opposable à l’employeur. En effet, contrairement au DIF, la formation en dehors du temps de travail n’est plus soumise à son approbation ce qui constitue une réelle avancée.
Une mise en œuvre plus encadrée dont les perspectives d’avenir demeurent incertaines
Comme indiqué plus haut, si le salarié peut opposer sa formation à son employeur ce n’est qu’à la condition qu’elle se déroule en dehors des heures de travail. Or, le nombre de salariés pouvant suivre une formation en dehors du temps de travail (principalement le soir, en semaine) demeure limité en raison des horaires de travail, du trajet et aussi, des contraintes familiales.
De surcroît, la formation qui se déroule en dehors du temps de travail ou pendant et ce, dans le cas où l’employeur aurait donné son approbation, doit être « éligible », c’est-à-dire qu’elle doit correspondre soit à renforcement du socle de compétences (savoirs fondamentaux tels que le français, les mathématiques), soit à un approfondissement des compétences dans le domaine professionnel du bénéficiaire.
Autrement dit, il ne sera plus possible au salarié de suivre une formation qui n’a rien à voir avec le métier exercé. La mesure est intelligente, permettra de limiter les abus de ces dernières années mais elle manquera certainement de nuance. Ainsi, le charpentier qui souhaitera suivre une formation en maçonnerie se heurtera certainement à un refus alors qu’il souhaite élargir ses compétences dans le domaine du bâtiment.
Un autre point qui semble passer sous silence : la nécessité d’obtenir l’approbation de l’employeur en cas de formation pendant les heures de travail. Or, on le sait par expérience, les refus sont nombreux et ne sont pas, sauf erreur, limités. La problématique demeure la même qu’avec le DIF, retour à la case départ…
Ce nouveau dispositif ne crée donc aucun droit opposable à l’employeur pas plus qu’aux financeurs.
Dans ces conditions, la mise en place d’un tel dispositif n’offre que peu d’espoirs et apparaît davantage comme un DIF amélioré qu’une réelle nouveauté.