Le tailleur célèbre l’histoire d’un grand couturier à la vie irréprochable, jusqu’à un événement qui va changer à jamais son existence.
Comme chien et chat
Ce qui est particulièrement intéressant dans cette série, c’est la proximité relationnelle entre l’antagoniste et le protagoniste. Il y a donc une profonde dualité entre le bien et le mal qui se rencontrent inlassablement. Dimitri est tyrannique, impulsif et, somme toute, dangereux ; il s’est construit sur la haine qu’il porte à son père. Durant son enfance, son père lui a maintes fois préféré son meilleur ami, ce qui l’a rendu jaloux et hargneux. Même si les deux personnages éprouvent une forte amitié l’un envers l’autre, ils ne partent pas sur le même pied d’égalité.
Salih Bademci, qui joue Dimitri, m’a beaucoup fait penser à Jack Nicholson dans son jeu d’acteur : il est à la fois félin et corbeau, prédateur et grand tourmenté. Il rie amèrement, jette des regards exorbités et prend la contenance d’un homme de la scène, prêt à divertir les spectateurs par son dynamisme.
D’ailleurs, on retrouve un plan qui laisse penser à un célèbre scène du film de Stanley Kubrick, Shining.


La démesure et l’attachement
La série prend pour décor des lieux d’exceptions. Les personnages vivent dans l’opulence et certains codes traditionnels subsistent dans les familles, ce qui ne manquera pas d’apporter de la matière à l’intrigue.
Par ailleurs, même si Peyami cache ses émotions, on peut apercevoir ses doutes qui le traverse lorsqu’il ne s’y attend pas. Il vit entouré de luxe et gère une grande équipe ; ce n’est pourtant pas de son travail que viennent ses angoisses. Les maux d’enfance se mélangent avec le présent et, tout comme Dimitri, il lutte avec son passé.
De manière générale, tous les personnages ont des comptes à rendre avec leur passé et beaucoup de questions restent en suspens, comme pour signifier que le présent ne suffit pas à régler tous les problèmes. L’amour que se portent les personnages aident à surmonter les difficultés, mais sont également la source des accablements.
La caméra spectatrice
Les mouvements de caméra sont remarquables, et il est facile d’imaginer que la steadicam a beaucoup été utilisée pour cette série. Les plans sont fluides et la caméra semble délirer de la même manière que les protagonistes. Entre les dutch angles, les plans renversés et les nombreux gros plans et inserts, les mouvements de caméra sont organiques et dynamiques. Ces procédés sous-entendent la personnification de la caméra qui reprend le regard sensible du spectateur, et traduisent les anxiétés des personnages (notamment de Peyami). Elle capture chaque détail, chaque mouvement, chaque hésitation. Elle n’est plus seulement un témoin de l’action : elle en est le centre.
Les objets ont également une grande importance, car c’est par eux que l’intrigue se noue. Sans même avoir besoin de communiquer, les personnages comprennent tout par des éléments inanimés, et certains inserts nous laissent aisément imaginer la suite des événements (notamment le bracelet). Les mensonges et les non-dits (la parole en somme) compte moins que le silence pour s’exprimer.
