Faut-il encore présenter Dune, le roman de science-fiction culte de Franck Herbert ? Avec sa planète des sables – Arrakis – ses vers géants, son climat inhospitalier et surtout son épice tant convoitée dans tout l’Imperium. Un livre ample qui mêle les genres et les thématiques, une épopée passionnante dans un univers envoûtant. Une œuvre d’une telle densité qu’elle fut réputée inadaptable au cinéma ; Lynch s’est cassé les dents dessus et la vision de Jodorowsky n’aura jamais connue la concrétisation sur grand écran. Jusqu’à ce que Denis Villeneuve (Premier Contact, Sicario, Prisoners, Incendies), s’étant déjà confronté à la suite du mythique Blade Runner, mette en images avec maestria Dune.
La guerre des épices
Attendu comme le messie, maintes fois reporté à cause de la crise sanitaire, Dune vient enfin de débarquer dans nos salles. Cette première partie (Villeneuve souhaite lui donner une suite) raconte l’histoire de Paul Atreides, jeune homme aussi doué que brillant, voué à connaître un destin hors du commun qui le dépasse totalement. Car s’il veut préserver l’avenir de sa famille et de son peuple, il devra se rendre sur la planète la plus dangereuse de l’univers – la seule à même de fournir la ressource la plus précieuse au monde, capable de décupler la puissance de l’humanité. Tandis que des forces maléfiques se disputent le contrôle de cette planète, seuls ceux qui parviennent à dominer leur peur pourront survivre…
Derrière ce synopsis, beaucoup pourraient y voir des ressemblances avec Star Wars. Mais précisons d’une part que le roman a été édité bien avant la célèbre sage de Georges Lucas et, d’autre part, qu’il en est l’exact opposé. Dès les premiers sons, premières notes de musique, premières images, le Dune de Denis Villeneuve est imposant, impressionnant. La suite du métrage en sera tout aussi magistrale. Avec une facilité inattendue, Villeneuve, aidé de son scénariste Eric Roth, plonge le spectateur dans la mythologie fascinante et complexe de cette œuvre culte. Un univers qui mêle pure science-fiction, intrigues politiciennes tentaculaires et culture du mythe. Une mythologie qu’il fallait prendre le temps d’appréhender tout en la rendant accessible au plus grand nombre. C’est sur ce point que Dune est une grande réussite, le réalisateur, comme à son habitude, joue sur la lenteur narrative sans être pour autant dénuée de rythme. Ce qui pourrait paraître antinomique, et pourtant ! Le film sait prendre son temps, déroulé son intrigue au fil des des découvertes, péripéties et autres trahisons, sans jamais oublié d’insuffler un souffle épique, ni perdre le spectateur. Alors que les minutes du métrage s’égrènent comme les grains de sable d’un sablier, le spectateur entre petit à petit dans l’univers de Dune jusqu’à se faire complètement happer.
Un style aussi pur que l’épice
Au-delà de l’adaptation assez fidèle et accessible, Denis Villeneuve réussi à faire correspondre son style, son identité, à l’œuvre qui aura fait vivre l’imagination de nombreux lecteurs dans le monde depuis des décennies. Aux prouesses techniques s’ajoutent une réalisation unique, grandiloquente. Ce dernier terme est d’ailleurs ce qu’il y a de plus important à retenir de cette adaptation. Ce Dune est imposant. De par sa beauté visuel qui passe par le travail du cadre, des lumières, mais aussi par ses décors en partie naturels, l’impressionnant travail autour du son sans oublier la magistrale bande-originale d’Hans Zimmer. Tout cela fait la puissance de Dune et lui donne un côté envoutant. Le style épuré de Villeneuve, froid dirons certains, se mêle parfaitement aux envolées grandioses, presque assourdissantes de l’image et du son. Le design de l’univers, des vaisseaux spatiaux, des costumes, partagent cette impression d’immensité.
Enfin, le casting est lui aussi une réussite. Timothée Chalamet (qui porte avec brio le costume de Paul), Rebecca Ferguson, Oscar Isaac, Dave Bautista jouent une partition parfaite. Mention spéciale pour Stellan Skarsgård, méconnaissable, qui incarne un ennemi intense et effrayant ; le terrible Baron Harkonnen.
Visuellement grandiose, mythologiquement fascinant, Dune est bien l’adaptation tant espérée. Envoûtant, transcendant, percutant, cette première partie force le respect pour son réalisateur qui a réussi l’impossible. Il prouve qu’il est possible de faire un blockbuster exigeant, cinématographique, sans être dénué d’une véritable vision artistique. Il ne reste plus qu’à espérer un grand succès en salles pour que Villeneuve s’attaque à la suite car cette première partie n’était qu’une mise en bouche. Et si nous assistions à la naissance d’une nouvelle grande épopée cinématographique comme Le Seigneur des Anneaux en son temps ? L’avenir nous le dira, en attendant savourons ce sublime morceau de cinéma. Quelle claque !