Parmi les nombreux épisodes de Final Fantasy, le VI, sorti initialement en 1994, est souvent considéré comme le meilleur. Une épopée riche en évènements, avec une dramaturgie plus prégnante que jamais, une galerie de personnages variée et une technique qui exploitait merveilleusement bien les capacités de la Super Famicom/SNES.
Et non, pas de la Super Nintendo, le jeu n’étant sorti en Europe pour la première fois que lors d’une réédition sur la première PlayStation (en 1999 au Japon, et en 2002 en Europe).
Une édition améliorée était sortie sur GBA en 2006, ajoutant quelques donjons… mais en massacrant un peu la bande-son.
Il y eut un portage mobile en 2014, hélas, la refonte graphique opérée dénaturait beaucoup le jeu et lui donnait un aspect « jeu flash » qui me déplaisait personnellement.
Nous voilà donc en 2022 avec la dernière itération en date de ce jeu mythique.
Attention toutefois, cette version ne comporte pas les quelques ajouts de la version GBA. Rien de grave. Ces ajouts sont parfaitement dispensables.
Il était une fois, au fond d’une GoT…
Votre périple débute dans le suivi d’une jeune fille arborant un diadème magique. Privée de sa volonté grâce à cet artefact, elle est une machine à tuer d’un Empire expansionniste. Bien vite, elle croise le chemin d’une créature ancienne prise dans la glace. Ses chaînes tombent. Sa volonté propre revient. Sa mémoire est altérée.
La voilà embrigadée dans une résistance dont vous allez suivre les actions à travers ces divers membres.
De rebondissements en machinations, votre quête vous mènera à une grande destinée incarnée par cette poignée de résistants.
Attention, en dépit de la mignonnerie des graphismes, c’est un jeu assez adulte avec ces drames, ces crimes de guerre et même quelques éléments romantiques. Le jeu ne manque pas de scènes mémorables. Encore aujourd’hui, même dans la pire des versions, la scène de l’opéra garde quelque chose de magique et de grandiose.
Les jeux, c’était mieux av… euh… c’est quoi ça ? Du RPG maker ?
Comme toujours avec les Final Fantasy à l’ancienne, vous parcourez un overworld, et vous entrez dans des villes ou points d’intérêts plus ou moins bien indiqués sur votre carte. Après une première partie dirigiste, vous êtes libre de parcourir le monde avec un aéronef avant d’affronter le grand méchant caricatural (qui correspond plus ou moins au Joker de Batman dans cet épisode).
Les combats se déroulent selon le très classique ATB (Active Time Battle). Dans ce système des jauges se remplissent plus ou moins vite en fonction des aptitudes des personnages. Elles permettent d’agir une fois ladite jauge complète. Sort, attaque standard, utilisation d’objet ou attaque spéciale. Ces attaques spéciales varient en fonction du personnage et incluent l’utilisation de machines, de technique du Bushido, de prières… Petite originalité : certaines impliquent la saisie d’input. Auparavant il fallait apprendre par cœur, désormais les inputs apparaissent à l’écran comme dans un QTE.
Dans cette version vous aurez droit d’activer les auto-combats et passer le temps plus vite vous faisant gagner un peu de temps. Les combats sont en effet aléatoires, nombreux, peu intéressants dans l’ensemble et tout ce qui peut aider à atténuer cette corvée est bonne à prendre.
Remaster pixel par pixel, rien qu’avec des pixels
Tout commence par l’intro… Très cinématique dans le jeu d’origine, avec le nom des développeurs apparaissant sur un traveling de gros robots avançant sous la neige. Ici, pas de noms pour ne pas mélanger les développeurs de l’original et du remaster… Deux ou trois minutes où il ne se passe pas grand-chose donc. Il y a mieux comme entrée en matière.
Heureusement les choses s’améliorent rapidement. Un des grands apports de cette version est la refonte des sprites. Originellement peu détaillés, ils profitaient des limitations des écrans CRT pour créer notamment des effets qui n’apparaissent plus sur les écrans LCD et OLED. Visuellement, le lifting est assez subtil quand on met les planches de sprites côte à côte. Les personnages sont toutefois plus clairs et lisibles. On apprécie que le remaster soit beaucoup plus respectueux de l’original que le portage mobile de 2014. L’apport est intéressant. On remarque plus facilement certains éléments ou certaines actions. Globalement ces modifications renforcent l’émotion que dégagent ces petits tas de pixels. Difficile de ne pas se laisser emporter par ces bonshommes sautillant sur place pour montrer qu’ils sont heureux ou baissant quelques pixels pour refléter leur tristesse. Nos avatars sont plus expressifs qu’avec n’importe quelle autre version.
Ce n’est que sur les effets, particulièrement de flammes, que le travail est vraiment flagrant et tranche clairement avec les versions précédentes.
Au global, c’est réussi, même le mode 7 tremblotant de la SNES est bien retranscrit. Pour rappel, il s’agit d’un mode graphique d’application de texture de la SNES. Il permet de faire pivoter l’arrière-plan et de zoomer dessus afin d’offrir un effet de profondeur qui était très typique de l’époque.
Mais là où le Pixel Remaster prend tout son sens, cela ne concerne pas le pixel.
Cad-audio
Les effets sonores ont été gardés de la version SNES, avec toujours le célèbre rire de Kefka, le grand méchant de cet épisode.
L’OST a en revanche été complètement revue. Les musiques mélangent quelques samples de l’époque, mais les intègrent dans des réorchestrations symphoniques globalement très réussies. Bien sûr dans le lot, il y a des compositions un peu moins enthousiasmantes. Mais cet élément permet de transcender le jeu et le rend beaucoup plus agréable à parcourir. Si vous n’êtes pas au fait de la série, ce Final Fantasy est l’un des meilleurs en termes d’OST. On peut donc dire que ces réorchestrations valent à elles seules de replonger le temps d’un run. Au négatif, les thèmes reviennent rapidement en boucle. Mais qu’est-ce que c’est beau ! La grande réussite de ce remaster.
Opéra wind frais
Alors la scène de l’Opéra a bien vieilli ? Et bien… Elle a été intégralement refaite. Chantée en plusieurs langues, dont le français (un chanteur est non francophone, mais ça passe). Passage en « HD2D » sur certains plans… Au final, j’ai trouvé ça génial. Cette scène mythique est sublimée. Les quelques anachronismes au niveau des effets sonores et l’antagoniste un peu ridicule permettent de conserver une certaine légèreté. C’est pour moi un fugace et précieux présent fait au joueur. Tant pis pour ceux qui crient au sacrilège.
Alors on craque ou pas ?
Si vous êtes fan et qu’il s’agit de votre jeu favori, vous pouvez largement choisir cette version comme nouvelle référence pour votre run annuel. Idem si vous n’avez jamais fait le jeu et que vous souhaitez le découvrir dans sa meilleure version et que vous êtes prêt à dépasser certains archaïsmes pour découvrir un classique. Des ajouts sont bienvenus tout de même, notamment sur le End Game facilité.
En revanche si vous êtes déjà passé à la caisse plusieurs fois pour ce jeu et que vous hésitiez à replonger : réfléchissez. Le jeu est un peu cher (18€) au vu de son âge. Les nouveautés sont quand même subtiles (sauf sur la bande-son et la scène de l’opéra). Le gameplay a vieilli. La narration à travers de petits sprites muets montre vite ses limites. Replonger en 2022 dans un jeu devenu un peu sec vous expose à un syndrome assez fréquent. On y joue deux heures avec un grand plaisir, et la courbe d’intérêt chute rapidement.
Et pour la suite, on sent déjà poindre un remake « HD2D », peut-être conditionné au succès de cette version…