Dans un autre style, la grande, l’immense Joyce Carol Oates me rappelle Stephen King. Non pas que ses récits, ses romans soient quelquefois grouillants de créatures venues de l’ombre, mais pour cette œuvre géniale qui s’agrandit au fil des années sans jamais s’épuiser. Son secret, on ne le connaît pas et c’est temps mieux. Qu’elle ne cesse pas d’écrire ; c’est tout ce qu’on demande.
Le monde de Joyce Carol Oates est une menace permanente. Ce sont des meurtres et des colères. Des histoires qui font songer à des piments que l’on croquerait d’un claquement sec de mâchoire, comme pour sentir le goût du mal.
Lire Oates, c’est accepter d’être porté comme un cerf-volant un jour où l’orage cogne au loin, derrières les nuages grisâtres et agressifs.
Avec Terres amères, son magnifique recueil de nouvelles, laissez-vous tenter par ce qui peut vous attendre de pire. Un pire qui néanmoins reste crédible.
Exemple 1 : la doyenne d’un collège oblige l’un de ses élèves à dénoncer ses camarades qui ont triché aux examens.
Exemple 2 : une ancienne top-modèle a honte de sa fille infirme et la traîne de restaurant en restaurant, fuyant systématiquement l’établissement avant l’arrivée du serveur.
Souvent des femmes. Des femmes cruelles, comme dans la réalité. Des femmes que chaque homme serait susceptible de croiser au détour d’une rue.
Avec Carthage, en revanche, un roman considérable, Joyce Carol Oates réussit la tragédie américaine de l’année 2015.
Carthage est un grand livre, mais c’est aussi un Etat de New-York.
En quelques mots, voilà : « Tout semble aller comme il se doit dans la petite ville de Carthage en ce début de juillet 2005, si ce n’est que Juliet Mayfield, la ravissante fille de l’ancien maire a, pour des raisons peu claires, rompu ses fiançailles avec le caporal Brett Kincaid, héros de retour de la guerre d’Irak. Un héros très entamé dans sa chair et dans sa tête, dont pourtant Cressida, la jeune sœur rebelle de Juliet, est secrètement amoureuse. Or, ce soir-là, Cressida disparaît, ne laissant en fait de traces que quelques gouttes de son sang dans la jeep de Brett. Qui devient alors le suspect numéro 1 et, contre toute attente, avoue le meurtre…
Sept ans après, un étrange personnage surgit qui va peut-être résoudre l’impossible mystère. C’est ce que vise Joyce Carol Oates qui est sur tous les fronts : violence, guerre, dérangement des esprits et des corps, amour, haine. Et même exploration inédite des couloirs de la mort… Un roman puissant et captivant. »
Alléchant, n’est-ce pas ?
Effectivement, n’ayez aucune crainte à vous lancer dans ce texte de quasiment six-cent pages, toutes mieux écrites les unes que les autres, où rien n’est laissé au hasard, où chaque phrase est à sa place, où chaque mot détient son sens.
Sous la plume de Oates, les histoires prennent vie de manière rarissime, et les sujets, quels qui soient, vous prennent aux tripes.