Fruit de l’association d’un cinéaste et du co-fondateur de Playdead, studio tout de même à l’origine de Limbo et Inside, Somerville, du nouvellement fondé studio Jumpship, est enfin disponible après environ cinq années de développement. Une certaine attente autour du titre s’est développée au fil des dernières années, en partie grâce au statut du développeur et de l’aura qui l’accompagne en raison de son CV. Somerville est clairement le descendant des titres de Playdead, aussi bien par sa structure que son gameplay. Pour autant, arrive-t-il à la cheville de ces succès passés ?
L’histoire commence par un long plan séquence d’une voiture qui trace sa route depuis une vue du ciel des plus plaisantes, sur fond de musique qui parvient à instaurer directement une ambiance particulière, et franchement agréable. Qu’on se le dise, les minutes qui vont suivre font partie des meilleures minutes de jeu vidéo que j’ai pu vivre dans ma longue vie de joueur. D’une originalité aussi simple que surprenante, le tout mené d’une main de maître.
Affalés devant la télévision, un couple et son enfant sont assoupis sur un canapé. L’enfant se réveille, et c’est à nous désormais de le manipuler, sans transition aucune. Celui-ci est interpellé par une mystérieuse lueur colorée, ainsi que de sons étranges. Je vous avoue avoir été directement happé par cette introduction, à la fois attendrie de contrôler le petit loup, et effrayé à l’idée qu’il puisse lui arriver quelque chose, l’ambiance étant particulièrement pesante. Je n’en dirais pas plus pour ne pas vous spoiler le reste de cette fabuleuse mise en bouche, l’un des points forts du jeu, si ce n’est LE point fort.
Quelques minutes plus tard, nous serons rapidement amenés à contrôler le père de cette petite famille pour démarrer cette aventure qui rappelle fortement Inside, le tout en étant bien plus cinématographique et proposant régulièrement des plans larges… parfois trop larges. En effet, un des premiers soucis avec lesquels il faudra composer durant les cinq heures que demandera notre voyage, c’est qu’il arrivera régulièrement que l’on ne sache pas quoi faire, voire où aller. Les plans trop éloignés ne permettent souvent pas de bien comprendre l’environnement, et même si l’on finit toujours par retomber sur nos pieds à un moment ou un autre, cela pourra toutefois s’avérer frustrant. Particulièrement lors des courses poursuites face à nos adversaires, dont le timing de ces dernières sont très serrées, le droit à l’erreur n’étant que très peu autorisé… Pour autant, il serait injuste de ne pas souligner la beauté de l’ensemble, ces mêmes panoramas étant très régulièrement d’une beauté post-apo des plus marquantes, le tout souligné par un rendu low-poly cel-shading du plus bel effet. Les effets de lumière et autres éclairages sont franchement réussis, on a même parfois l’impression d’observer de vrais tableaux.
En terme de gameplay, notre héros se verra attribué le pouvoir de manipuler une matière d’origine extra-terrestre, et ce de plusieurs manières. Avec la gâchette droite, on deviendra une espèce de « super conducteur » qui va intensifier les sources lumineuses avec lesquelles nous interagissons directement, ce qui aura pour effet de faire fondre cette mélasse cosmique. Plus tard dans la progression, on pourra au contraire faire durcir celle-ci… Et enfin ce pouvoir évoluera une dernière fois en toute fin d’aventure, mais une fois encore, je préfère ne pas en dire plus histoire de ne pas trop en dire afin de garder un minimum d’effet de surprise, qui fait grandement partie du plaisir du jeu. D’un point de vue scénaristique, même si le jeu est plutôt clair la plupart du temps, sans le moindre dialogue comme souvent dans ce type de jeu, la fin reste un brin cryptique à mon goût, ce qui laisse évidemment libre court à notre imagination et notre propre interprétation. L’ensemble reste suffisamment intéressant pour nous donner envie de voir le fin mot de cette drôle d’histoire, et c’est bien là le principal.
Somerville est un titre assez unique en son genre, qui bénéficie d’une des meilleures introductions de l’histoire du jeu vidéo à mon sens, même si malheureusement tout n’est pas parfait et que certaines faiblesses viendront un peu gâcher la fête. Pour autant, l’aventure, bien qu’assez courte, reste haletante et le rythme de celle-ci suffisamment bien géré pour capter de manière continue l’attention du joueur, avec quelques séquences bien sympa (mention spéciale à une certaine scène de festival). Proposé dans le GamePass de Xbox, les abonnés auraient bien tort de ne pas au moins s’y essayer, ne serait-ce que pour profiter de ce début du jeu aussi intense qu’original et bien mené. Un très bon jeu, même s’il n’arrive pas tout à fait au niveau du monument qu’était Inside.