Ceux qui nous suivent régulièrement le savent, chez Conso-Mag, nous aimons nous faire peur. Des ruelles d’Arkham aux sombres recoins des Demeures de l’Epouvante en passant par l’obscurité menaçante de quelques galeries souterraines, il n’est pas un frisson que nous rechignons à faire courir le long de notre échine. Aussi, quand Asmodée nous a invités dans le sombre et lugubre manoir qui trône au sommet de la colline, nous nous y sommes précipités. Pile dans la gueule du loup (ou de la sorcière, du démon, du maniaque, … c’est selon).
A la lumière faiblarde du plafonnier de la voiture, vous observez encore une fois la carte routière étalée sur vos genoux. Le constat est sans appel : la petite route de campagne sur laquelle vous et vos compagnons vous êtes engagés il y a déjà quelques heures ne figure nulle part. Alors que dans une gerbe de fumée le moteur pousse son dernier soupir, l’anxiété gagne l’habitacle. La nuit est d’un noir d’encre et les ténèbres qui s’amoncellent autour de vous semblent prêtes à vous engloutir. Pourtant, au loin, une lueur est synonyme d’espoir. Sur la colline qui domine la forêt où vous vous êtes perdus, un immense manoir ferait presqu’office de phare. A une de ses fenêtres, la lumière d’une chandelle vacille. Vous décidez de vous y présenter et même si les lieux semblent abandonnés, vous restez persuadés que vous y réfugier était la chose à faire. Mais c’était avant que la porte grinçante ne se referme derrière vous et qu’un rire sinistre ne résonne dans les couloirs de la demeure…

Mieux vaut être seul que mal accompagné, vous l’apprendrez à vos dépens…
Betrayal at House on the Hill est jeu semi-coopératif scindé en deux parties. Dans la première, les joueurs vont principalement explorer le manoir lugubre où ils pensaient trouver refuge. En retournant des tuiles représentant les différentes pièces de la maison, ils vont en découvrir quelques recoins (souvent inquiétants), y glaner des objets, y être confrontés à l’un ou l’autre événement et même y subir les pires présages. Cette première phase de jeu est véritablement une phase d’exploration et sert à installer le décor de la suivante. Au gré de leurs pérégrinations, les joueurs vont tenter d’améliorer leurs attributs comme la force, la rapidité, le savoir et la santé mentale (gageons que cette dernière n’en sortira pas indemne).
Dans la seconde phase de jeu, déclenchée par une carte présage et un lancer de dés malheureux, la hantise commence. Un des joueurs (qui sera désigné par la combinaison de l’endroit où la hantise a été découverte et de la carte qui en est à l’origine) devient le traître alors que les autres joueurs deviennent (ou plutôt restent) les héros. A partir de là, le jeu propose un scénario (il y en a 50 différents) et chaque « camp » s’empare de son propre livret (un pour le traître et un pour les héros) pour y prendre connaissance des détails de l’histoire. Outre une mise en ambiance (très à propos), les livrets vont livrer à leur(s) détenteur(s) les conditions de victoire et quelques règles particulières applicables au scénario joué. Et que le lugubre jeu de cache-cache débute…

Et l’ami, le frère, se mua en monstre…
Par son déroulement en deux phases, Betrayal at House on the Hill ne ressemble à aucun autre jeu connu. En débutant la partie, aucun des joueurs ne sait lequel d’entre eux se muera en traître et ils n’ont pas le moindre indice sur le scénario qui se trame dans leur dos. Cette mécanique originale est un indéniable atout pour le jeu. Elle plonge les joueurs dans l’ambiance très particulière des (mauvais) films d’horreur qui ont fait le succès du genre. Le plaisir d’explorer une maison que l’on sait hantée est déjà très présent et il s’accentue encore quand le traître est tout à coup révélé (et que le danger se matérialise littéralement à côté de nous).
En ce qui concerne le matériel, ne cachons pas qu’il n’est pas aussi beau qu’espéré. Il fait certes le travail mais il aurait mérité d’être un peu plus soigné. Les habitués des jeux de figurines resteront par exemple très sceptiques quand il s’agira de faire évoluer les héros dans les différentes pièces de la maison (même si ces figurines ont le mérite d’être prépeintes). De la même façon, la mécanique originale qui régit le jeu a les défauts de ses qualités. Même si certains garde-fous (une expression qui colle bien vu le thème du jeu) ont été mis en place pour tenter de préserver au maximum l’équilibre du jeu, il peut arriver qu’une partie soit déséquilibrée. Une énorme poisse sur un test de hantise peut par exemple faire débuter cette dernière très tôt dans la partie et ainsi favoriser largement l’un ou l’autre camp (en fonction du scénario joué). Toujours dans la même veine, la configuration aléatoire du manoir (qui est au demeurant une excellente chose) peut par exemple piéger un héros au sous-sol, le condamnant à perdre un temps précieux à retrouver son chemin au lieu d’œuvrer à contrer la hantise.
Cela dit, ne boudons pas notre frousse, ces petits bémols n’entachent pas la qualité intrinsèque du titre, loin de là. Ils sont largement compensés par la mécanique du jeu, son originalité et l’ambiance mi-peur mi-fou rire qu’il réussit à insuffler à chaque partie. A n’en pas douter, Betrayal at House on the Hill saura séduire les amateurs de jeux narratifs et immersifs, particulièrement ceux qui sont également des aficionados des films d’horreur des années 80’.
Betrayal at House on the Hill est un jeu de Mike Selinker, Rob Daviau, Bruce Glassco, Teeuwynn Woodruff et Bill McQuillan, édité initialement par Avalon Hill et distribué en français par Asmodée.

Nombre de joueurs : 2 à 6
Âge : dès 12 ans
Durée moyenne d’une partie : 60 à 90 minutes