Dire que le premier roman de Tom Cooper, déjà auteur de nombreuses nouvelles qui lui ont valu d’être quatre fois nominés pour le prestigieux Pushcart Prize, suscitait beaucoup d’attente serait un euphémisme.
Quand le maître incontesté du thriller américain, Stephen King, le qualifie de « sacré bon roman » et que Donald Ray Pollock, dont la profondeur des personnages et la noirceur de l’excellent « Le Diable, tout le temps » ont marqué les esprits, avoue « avoir ressenti l’effroi dans ce roman aussi brillant que palpitant », ce n’est plus de l’impatience qu’engendre la sortie des « Maraudeurs » mais carrément de l’engouement. Et nous devons avouer que Tom Cooper ne nous a pas déçus.
L’histoire prend cours à Jeanette, petite bourgade côtière de Louisiane encore marquée par les ravages de l’ouragan Katrina en 2005 et qui doit désormais faire face à une terrible marée noire. C’est là, où la moiteur du bayou côtoie un soleil de plomb, que nous suivrons les tribulations de quelques pauvres hères dont les histoires se mêlent et s’entremêlent. Il y a d’abord l’ineffable Gus Lindquist qui semble avoir tout perdu à commencer par sa femme, son bras, sa prothèse et peut-être même la raison. Pêcheur de crevettes et clown triste dépendant aux antidouleurs, il arpente les marécages un détecteur de métaux à la main à la recherche du trésor du célèbre pirate Jean Lafitte. Il y croisera Wes Trench, adolescent déboussolé qui tient son père pour responsable de la mort de sa mère, les jumeaux Toup, caïds locaux et propriétaires auto-déclarés d’une île où ils cultivent une quantité astronomique de cannabis, Braddy Grimes, enfant du pays à la solde de British Petroleum et, enfin, Hanson et Cosgrove, deux minables en baguenaude qui multiplient les plans douteux.
La narration précise, les dialogues percutants et les descriptions toujours plus réalistes nous entraînent littéralement dans le cœur du bayou. Dès l’entame du livre, le lecteur se sentira happé par le décor au point de ressentir la moiteur des marécages sur le bout de ses doigts, de percevoir les fumets d’un gombo qui mijote, d’entendre çà et là les rires gras et édentés de quelques pêcheurs de crevettes sans-âge et le tout sous le regard torve d’un alligator paresseux.
En un seul roman, Tom Cooper vient de se propulser parmi les auteurs américains qui comptent et qui méritent qu’on surveille de près leurs prochaines sorties. Enfin, preuve s’il en est que « Les maraudeurs » a tapé dans l’œil de quelques connaisseurs, les producteurs de « Breaking Bad » en ont acheté les droits et travaillent actuellement avec l’auteur à une adaptation sous format série télévisée. Affaire à suivre !
Les Maraudeurs, un livre signé Tom Cooper et édité par Albin Michel